Titre

Cheminements révolutionnaires

Sous titre

Un an de mobilisations en Algérie, 2019-2020

Auteur

Ouvrage collectif dirigé par Amin Allal, Layla Baamara, Leyla Dakhli, Giulia Fabbiano

Type

livre

Editeur

Paris : CNRS éditions, 2021

Nombre de pages

350 p.

Prix

25 €

Date de publication

25 janvier 2023

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Cheminements révolutionnaires : un an de mobilisation en Algérie (2019-2020)

Publié sous la direction d’une équipe interdisciplinaire de spécialistes, ce livre s’adresse d’abord aux chercheurs en sciences sociales. On y trouvera ainsi des clefs d’analyse et des repères conceptuels sur le phénomène des surgissements populaires. Car l’ouvrage a pour objet ce peuple en révolution, ce mouvement révolutionnaire appelé le hirak qui s’est emparé de l’Algérie à partir du 22 février 2019 et qui a fait l’objet de plusieurs études dont certaines ont d’ailleurs été recensées sur notre site web1. Si le présent ouvrage n’est donc pas le premier à traiter du hirak, son originalité réside peut-être justement dans cette mise à distance sinon délibérée, du moins bienvenue pour proposer quelques mises en perspectives.

Les auteurs ont choisi de borner leur objet d’études à ces treize mois qui s’écoulent de la première manifestation algéroise à la mise à l’arrêt du mouvement à cause de la pandémie du Covid-19. On se reportera d’ailleurs volontiers à la chronologie détaillée à la fin de l’ouvrage pour en suivre l’évolution. Avec un certain recul donc, les auteurs sont aussi en mesure de proposer une première synthèse. Ils mettent ainsi à la disposition du lecteur des récoltes directes de matériaux (écrits, postés, photographiés), une liste volumineuse d’études secondaires reprise dans la bibliographie finale et, plus généralement, une approche bâtie autour de quelques concepts clefs, à l’instar de ce que développe Giulia Fabbiano sur la notion de “diaspora” p. 164-165. Les auteurs ont enfin placé leurs études respectives sur un temps plus long, non seulement en remontant les fils des engagements individuels et collectifs, mais aussi en tentant d’en comprendre les effets sur la société algérienne, y compris au-delà des frontières nationales.

Composé de dix articles qui sont en réalité autant d’études de cas recouvrant de multiples espaces sociaux, l’ouvrage est divisé en deux parties.

Intitulée “Regards porté sur le hirak, un chemin à suivre ?”, la première partie s’attache surtout à étudier quelques effets du hirak : sur un groupe comme les aspirants harragas2, candidats au départ vers l’Europe, sur des milieux plus politisés, voire sur le régime lui-même souvent analysé comme “résilient” et abordé ici sous l’angle de ses fragilités. Parce qu’ils sont pour la plupart familiers du terrain algérien depuis plusieurs années, certains auteurs restituent les événements dans une moyenne durée : Siham Beddoubia à partir de son travail sur le monde syndical par exemple, ou bien encore Laurence Dufresne-Aubertin revenue interroger les “gars du quartier”, ces “jeunes hommes de quartiers populaires dont les mobilisations (rares) sont plus souvent vues comme des émeutes apolitiques” (p. 25).

Intitulée “Au cœur du hirak : un monde en observation ?”, la deuxième partie de l’ouvrage regroupe cinq autres études qui visent à comprendre les logiques des mobilisés, leurs aspirations comme leurs inventions. Saphia Arezki s’attarde ainsi sur la manière dont les révolutionnaires manient l’histoire, la relisent et la redéploient. De même, Amar Mohand-Amer interroge la question des élections et l’opposition entre état civil et militaire à la lumière de l’histoire, tandis que Nedjib Sidi Moussi revient, sur le hirak, à celle d’un “futur déjà déterminé”. D’autres contributions se penchent sur le milieu de la contrebande maritime, ou bien encore sur la mobilisation algérienne en France.

Les différents auteurs nous offrent ainsi non seulement les fruits d’une recherche pointue, mais plus encore une plongée dans la réalité algérienne. Doté d’un appareil critique solide et d’une série d’encadrés bien documentés (dont celui saisissant sur la figure de “la Ballerine du hirak” p. 213), l’ouvrage constituera certainement un outil précieux et de référence pour mener à bien des travaux sur la société algérienne contemporaine. Mais tout passionné d’Algérie y trouvera matière à réflexion.

Rémi Caucanas3

Notes de la rédaction

1 Cf. Nos recensions des livres où il est question du hirak : France-Algérie : résilience et réconciliation en Méditerranée / Boris Cyrulnik et Boualem Sansal ; Algérie, la nouvelle indépendance /Jean-Pierre Filiu ; Retours d’histoire : l’Algérie après Bouteflika / Benjamin Stora ; Géopolitique de l’Algérie / Kader A. Abderrahim ; La cinquième mascarade /Youcef Zirem ; Le soulèvement algérien : dossier de la Revue Esprit, n° 455, 2019… etc.

2 Cf. Infomigrants sur les harragas, migrants algériens.

3 Rémi Caucanas, docteur et chercheur en histoire, est l’auteur de plusieurs ouvrages sur les relations entre chrétiens et musulmans et, notamment de : Jacques Lanfry : un lion, l’Église et l’Islam.– Rome : PISAI (Pontificio Istituto di Studi Arabi e d’Islamistica), 2021 ; Étienne Renaud, la passion du dialogue .-Marseille : Publications Chemins de Dialogue, 2017 ; Chrétiens et musulmans en Méditerranée : Ombres et lumières de l’entre-deux guerres (1919-1939) / préface de Mgr Jean-Marc Aveline.- Marseille : Publications Chemins de Dialogue, 2017 et de Relations islamo-chrétiennes en Méditerranée : entre dialogue et crispation.- Presses Universitaires de Rennes, 2015. Chercheur associé à l’Institut de Recherches et d’Études sur le Monde arabo-musulman (IREMAM, Aix-en-Provence, France) et au PISAI, il enseigne aujourd’hui l’histoire des relations islamo-chrétiennes à l’Université Saint-Paul à Ottawa. Voir aussi ses autres contributions et recensions de livres sur le site de CDM.

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