Interroger Dieu.

Deux frères dominicains¹, l’un, Timothy Radcliffe, anglais, auteur spirituel bien connu et ancien maître général de son Ordre², l’autre, Lukasz Popko³, polonais, enseignant à l’École biblique et archéologique française de Jérusalem⁴, ont choisi d’échanger librement entre eux, autant sur les interrogations que Dieu nous adresse dans les Écritures que sur les interrogations que nous sommes en droit d’adresser à Dieu.

Ils ont donc sélectionné, tous les deux, des passages bibliques dans lesquels nous pouvons faire nôtre un certain nombre d’interrogations adressées à Dieu ou que Dieu nous adresse.

Voici quelques exemples retenus par les auteurs. Ainsi, dans l’Ancien Testament – : “Où es-tu ?” (Genèse 3, 9), “Où est Abel ton frère ?” (Genèse 4, 9), “Où est Sarah, ta femme ?” (Genèse 18, 9). Nous trouvons aussi : “Quel est ton nom ?” (Genèse 32, 28), “Est-il bon pour toi d’être en colère ?” (Jonas 4, 1), etc. Et dans le Nouveau Testament, nous trouvons également : “Comment cela arrivera-t-il ?” (Luc, 1, 34), “Mon enfant, pourquoi nous traites-tu ainsi ?” (Luc, 2, 48), “Comment peux-tu, étant un Juif, me demander à boire, alors que je suis une femme samaritaine ?” (Jean, 4, 9), “Qui dites-vous que je suis ?” (Matthieu 16, 15), “Qu’est-ce que la vérité ?” (Jean 18, 38), “Est-ce que tu m’aimes plus que ceux-là ?” (Jean 21, 15)

A partir d’une nouvelle traduction des différents passages dans lesquels nous trouvons ces interrogations, les deux auteurs échangent librement leurs commentaires, chacun selon sa sensibilité et sa compétence. Ils précisent les raisons de leur choix de ces conversations bibliques : c’est “tout simplement parce qu’elles nous plaisent, pas pour exposer une théorie parfaitement cohérente sur la lecture des Écritures.”

Dans les citations retenues, Dieu interroge aussi souvent qu’il est interrogé. Pour les auteurs en effet, “le christianisme n’est pas une religion du livre mais de la rencontre avec le Seigneur.” Ainsi croisent-ils, sur ces textes, des remarques compétentes, mais jamais savantes, avec des références à l’actualité vécue par l’humanité d’aujourd’hui mais aussi avec de nombreuses évocations d’œuvres littéraires et artistiques⁵. Les commentaires sont habités par des références au présent, notamment en ce qui concerne le drame des migrations et de la pauvreté. Les auteurs eux-mêmes conseillent de faire “une lecture méditative” de leur texte. Il faut bien reconnaître que leurs commentaires, qui n’ont rien de systématique ou de scolaire, se prêtent volontiers à une telle lecture. L’importance de la dimension relationnelle de la vie humaine est fortement mise en valeur tout au long de l’ouvrage.

Il ne s’agit pas d’un livre qu’il faut lire à la suite comme ce peut être le cas pour un roman ou une thèse, mais dans lequel on peut régulièrement venir “piocher” des réflexions stimulantes qui nous plongent dans les conversations au cours desquelles Dieu nous interroge aussi souvent qu’il est interrogé.

L’épilogue qui termine l’ouvrage souligne la nécessité urgente, actuellement, de l’écoute et du silence, de l’accueil fraternel, de l’attention à la Parole de Dieu. A signaler – fait rare – que ce livre est préfacé par le pape François qui insiste avec force sur la nécessité de poser des questions, ce qui signifie que l’on ne se contente pas de ce qui existe.

Alain Durand⁶

Notes de la rédaction