Paul et les femmes : ce qu’il a écrit, ce qu’on lui a fait dire.

Dans ce petit livre, le spécialiste et fin connaisseur des écrits de Paul qu’est l’exégète Michel Quesnel entend rendre justice à celui dont la réputation de misogynie n’est plus à faire, solidement établie à partir de quelques phrases tirées de ses lettres, phrases insupportables à entendre aujourd’hui !

À la lumière des études récentes, tant en matière d’exégèse que de la connaissance de la littérature antique, l’auteur s’attache à resituer les passages incriminés, dans leur contexte historique et littéraire, pour en proposer une lecture soucieuse de faire la part, comme le dit le sous-titre du livre, entre ce que l’apôtre “a écrit” et “ce qu’on lui a fait dire” au fil des siècles. Une précieuse clé de lecture est ainsi donnée aux lecteurs, invités à porter un regard neuf sur des textes dont on pouvait penser qu’ils n’avaient plus rien à nous dire.

En trois chapitres, l’ensemble du corpus paulinien est parcouru, des lettres authentiques de Paul (1 Thessaloniciens, 1 et 2 Corinthiens, Galates, Romains, Philémon, avec une note brève sur Philippiens – “l’épître la plus asexuée de toutes les lettres authentiques de Paul” – ), aux écrits antiques sur Paul (Actes des Apôtres, Actes apocryphes de Paul, écrits des Pères de l’Église), en passant par les épîtres des disciples de Paul (1 et 2 Timothée, Colossiens, Éphésiens, 2 Thessaloniciens, Tite). Un bilan de la question étudiée conclut chaque partie. Concernant les lettres authentiques, il apparaît qu’”accuser Paul de misogynie ou d’antiféminisme n’a aucun fondement”. Mais l’on constate aussi que plus le temps passe, plus le poids des conventions inhérentes à une société patriarcale se fait sentir dans les écrits des successeurs de Paul.

En revanche, dans les Actes des Apôtres, Luc souligne l’importance de la place des femmes dans l’itinéraire missionnaire de Paul : Lydie ou Priscille sont clairement désignées comme ses collaboratrices. Dans les Actes apocryphes, tout en confiant une mission d’évangélisation à Thècle, Paul valorise la continence et la virginité pour les chrétiens, hommes et femmes : “Cette image continuera de coller à la personne de Paul au cours de nombreux siècles” (p. 124). “Quant aux Pères de l’Église dont la plupart sont de fervents partisans de la virginité pour les deux sexes”, conclut M. Quesnel au terme de son enquête, ils ont fortement contribué à interpréter les “écrits pauliniens dans un sens défavorable aux femmes, toute femme portant sur elle le péché attribué à Ève aux origines du monde” (p. 130).

“Revisiter avec Paul la place du féminin” : en lançant, en guise de conclusion, cette invitation aux Églises d’aujourd’hui, ce petit livre rejoint une actualité ecclésiale brûlante ! Il ne manquera pas de nourrir la réflexion des groupes synodaux.

Odile Flichy¹

Note de la rédaction