Titre

Du fanatisme

Sous titre

Quand la religion est malade

Auteur

Adrien Candiard

Type

livre

Editeur

Le Cerf, 1er oct. 2020

Nombre de pages

89 p.

Prix

10€

Date de publication

26 octobre 2020

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Du fanatisme. Quand la religion est malade

Quel Dieu invoquent les fanatiques qui tuent en son nom ? Le fanatisme est-il la marque tragique d’un excès de religion ? A ces questions d’une tragique actualité, le dominicain Adrien Candiard1 répond, à la fois en théologien et en croyant, dans un court livre qui bouscule bien des idées reçues.

Pour sa réflexion, l’auteur part d’un évènement survenu en Ecosse voici quelques années, comme il aurait pu le faire, hélas, de l’attentat de Conflans-Sainte-Honorine survenu le 16 octobre 2020, 2 semaines après la parution de ce livre. Un épicier musulman pakistanais a été tué en 2016 à Glasgow par un de ses coreligionnaires, le considérant comme apostat pour avoir souhaité « Bonnes Pâques » à ses amis chrétiens. Cet assassin fanatique était-il un dément, que l’excès de sa religiosité a placé hors du champ de la raison humaine, et de notre humanité ? 

Non, répond Adrien Candiard. Le fanatisme a sa logique, sa cohérence ; et « cette cohérence n’est pas celle d’un excès de Dieu, mais au contraire le signe même de sa dramatique absence, au sein même de discours pieux et religieux » (p.84). L’auteur, spécialiste d’études islamiques, analyse en effet le salafisme – ce courant religieux qui a entrepris de « réformer » l’islam d’une façon absolutiste et régressive -, comme une « théologie dont Dieu est absent, sauf sous la forme de commandements » (p.38), un pieux agnosticisme.

Reprenant une vision de l’islam développée à l’époque médiévale par un courant alors minoritaire, le hanbalisme, les salafistes considèrent que Dieu est inaccessible à la raison et à la relation du croyant. Un Dieu tellement transcendant qu’il en devient absent. De lui nous ne connaissons que sa volonté, ses commandements, qui sont dès lors revêtus d’une autorité absolue : y compris d’ailleurs sur des questions, à l’origine, marginales ou absentes du Coran, comme la tenue des fidèles. Et puisque la raison, la relation personnelle du croyant à un Dieu qui aime, n’ont ici pas de place, la violence2 devient un moyen légitime et efficace pour que soit appliquée cette Loi.

Le fanatisme n’est pas l’apanage des salafistes et des djihadistes, qui ne sont eux -mêmes qu’un courant au sein des musulmans, analyse l’auteur. Et la maladie du fanatisme n’atteint pas que l’islam, rappelle-t-il, car les chrétiens ont été d’une extrême violence lors des Guerres de religion. Et les chrétiens d’aujourd’hui, violence mise à part, restent affrontés au risque d’absolutiser la Bible, la liturgie ou la morale, traitées comme des idoles, en l’absence d’une relation personnelle avec Dieu.

L’enfermement fanatique a donc un sens spirituel, qui est le refus de la spiritualité et de l’amour personnel de Dieu. Et la réponse au fanatisme, même si elle doit être aussi politique et sociale, doit être également une réponse religieuse. En réintroduisant la théologie, un discours soumis à la raison et à la contradiction, dans le débat public. En conversant de Dieu avec les autres, dans le cadre, notamment, d’un dialogue interreligieux3 sincère, qui nous apprend que Dieu est plus grand que ce chacun de nous pense en connaître. En ouvrant en nous l’espace de Dieu, plutôt que des idoles, un Dieu en face duquel nous ne « pouvons être autre chose que mendiant » (p.79).

Bertrand Wallon

1 Adrien Candiard, dominicain vivant au Caire, est membre de l’Idéo (Institut dominicain d’études orientales). Il est notamment l’auteur de Comprendre l’islam ou plutôt : pourquoi on n’y comprend rien (2016) et de la pièce Pierre et Mohamed jouée pour la première fois en 2011 et dont le texte a été publié en coédition par Le Cerf et Tallandier, en 2018. Son livre Du fanatisme : quand la religion est malade développe le propos d’une conférence qu’il a donnée à Lyon, le 7 janvier 2020, au Couvent des dominicains.

Notes de la rédaction :

2 A propos de violence et religion, voir livres suivants :

Violences et religions (titre d’ensemble : Les religions à l’école) / Christian Salenson et Dominique Santelli (dir.).- Marseille : Publications Chemins de Dialogue, mars 2020.

Les versets douloureux : Bible, Évangile et Coran entre conflit et dialogue / David Meyer, Yves Simoens, Soheib Bencheikh.-Bruxelles : Lessius, 2007. 

En finir avec la tolérance ? Différences religieuses et rêve andalou /Adrien Candiard.- Presses Universitaires de France, janvier 2014.

3 Sur les relations interreligieuses – voire le dialogue interreligieux -, on pourra se reporter aux livres suivants :

Musulmans et chrétiens : pistes pour un dialogue sans angélisme ni pessimisme / Hicham Abdel Gawad.- Waterloo (Belgique) : La Boîte à Pandore, 2018.

Dialogue interreligieux, quel avenir/ Pierre Diarra et Michel Younès, dir. Mgr Michel Dubost, préf.- Marseille : Publications Chemins de dialogue, mai 2017.

Catholiques – Musulmans : une fraternité critique / Mgr Michel Dubost.- Médiaspaul, 2014.

L’hospitalité divine : l’autre dans le dialogue des théologies chrétienne et musulmane /Fadi Daou, Nayla Tabbara ; préface de Jean-Marc Aveline.- LIT Verlag, 2014.

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