Vade retro: démission officielle du patriarche Sfeir

Le Patriarche aurait présenté sa démission, annonçait hier le quotidien Al Shark el Aswat, chose que le siège patriarcal a formellement démenti à la presse libanaise. La déclaration faite aujourd’hui par le ministre du Travail, Boutros Harb, a été un autre coup de butoir puisqu’il confirmait que le patriarche avait présenté sa démission, il y a de cela plusieurs mois et que le Vatican l’étudierait actuellement.

Cependant, alors que la crédibilité du Prélat Maronite est complètement encornée en raison de son implication dans les affaires temporelles, il se pourrait que cette démission soit « d’un tout autre son de cloche ». Selon les rumeurs qui me sont parvenus depuis un temps certain, ce n’est pas le patriarche qui aurait démissionné mais le Vatican qui aurait demandé à Nasrallah Boutros Sfeir de se retirer. Ce dernier aurait accepté sous condition, notamment qu’il puisse nommer les 8 évêques aux postes actuels vacants -car la politique suivie par le Patriarcat et qui a mené vers la division des Chrétiens du Liban, ne faisant plus l’unanimité au sein des instances religieuses maronites – et que ces derniers puissent choisir un nouveau locataire du Palais Patriarcal « dans la continuité de ce dernier », c’est à dire en faveur d’un seul camp, celui du 14 Mars et plus particulièrement des Forces Libanaises.

Le verdict du Vatican serait prononcé après l’inauguration d’une nouvelle statue de St Maroun à Rome, c’est-à-dire entre le 14 et le 20 février prochain, mais gageons que ce nouveau développement n’est pas sans rappeler que ces rumeurs courent depuis un certain temps, toutefois, il s’agit là d’une confirmation de ce qu’on savait depuis longtemps, il n’y avait donc pas de fumée sans feu.

L’autre développement « religieux » concerne cette fois-ci, la communauté sunnite, son Mufti – content, qui semblait avoir reçu « la contribution volontaire du Courant du Futur – s’étant prononcée en faveur de la nouvelle nomination de Saad Hariri au poste de premier ministre. Cette ingérence flagrante dans le domaine du temporel ne provoque cependant pas le même débat au sein de cette même communauté sur la place de la religion et de son action sur la scène politique, il suffit que le Mufti parle et que les questions soient tranchées.

La position du Premier Ministre, tout comme la Présidence du Conseil ou la Présidence du Parlement est cependant une position nationale, bien que dévolue à une certaine communauté, son rôle va au delà de cette communauté. L’erreur commise par le Mufti de la République est la même erreur commise par les tenants du Maronistime politique, ce qui n’aidera donc pas au règlement de la question du sectarisme politique mais qui pourrait au contraire compliquer plus encore la question. Cela, paradoxalement, n’aidera pas la communauté sunnite libanaise, sur le déclin démographique en faveur de la communauté chiite comme le rappelait un article de Robert Fisk, pour ne pas parler de son déclin démocratique, puisque le libre-choix de ses dirigeants n’existe plus.

Au sujet du Mufti de la République, Mohammed Kabbani, un Cheikh du Nord Liban a rappelé hier, que ce dernier, tout comme le patriarche maronite d’ailleurs, ne faisait plus l’unanimité au sein des classes dirigeantes des institutions religieuses. Accusé d’avoir dilapidé d’importantes sommes de Dar el Fatwa, l’année dernière, au profit de son fils, l’affaire avait été rapidement enterrée suite à la nomination d’un autre proche de Saad Hariri, l’ancien premier ministre Fouad Saniora comme comptable de Dar el Fatwa. Ce même cheikh accusait Mohammed Kabbani d’avoir volé les ayants droits du Centre-Ville de Beyrouth en soutenant aveuglement Rafic Hariri etc…

L’accaparation par certains partis politiques des dirigeants religieux des communautés auxquels ils appartiennent, est aujourd’hui le principal tord causé aux véritables croyants. Nos bons religieux libanais doivent apprendre à séparer le spirituel et donc le sacré du temporel, source de corruption. Malheureusement, ces dirigeants ne l’ont jamais compris, discréditant par cela leur propre fonction. La colère gronde, mais cela n’est cependant pas prêt à provoquer une révolution. Source Mouvement pour le Liban

Le Patriarche Mar Nasrallah Boutros Sfeir « a présenté sa démission » auprès du Vatican

Les rumeurs circulaient déjà depuis plusieurs semaines. Les visites répétées du Cardinal Sfeir au Vatican trouvent finalement leur explication suite à la déclaration du ministre du travail M. Boutros Harb après sa visite dominicale chez le patriarcat maronite.

« Il est connu que le Patriarche a souhaité présenter sa démission depuis des mois et pas d’hier et c’est au Vatican que revient la décision de refuser ou d’accepter le choix du Patriarche au moment approprié ». Et le ministre d’ajouter : « jusqu’à présent, il n’a pas reçu de réponse. Au contraire, ce qui s’est passé, c’est que le Vatican reste sur sa position d’attente et cela me conduit à dire que peu importe les circonstances, si la démission est acceptée ou non, le patriarche Nasrallah Boutros Sfeir est un grand patriarche dans l’histoire de l’Eglise maronite ».

Il restera pourtant pour beaucoup de Chrétiens le patriarche qui a divisé sa communauté, privilégiant et protégeant les criminels de guerre tels que Samir Geagea. En 1990, lorsque le Liban traverse une sombre période de son histoire, et alors que le soutien de tous les hommes libres pouvait sauver le pays, le patriarche Sfeir se rangea du côté pro-syrien pour appuyer les accords de Taëf. Ceux-ci consacraient à la fois la réduction du pouvoir chrétien à travers une diminution des prérogatives du président (maronite) de la république et la mise sous tutelle du pays par les Syriens.

L’implication dans la politique libanaise du patriarche Sfeir, incontestable grand homme de foi, laissera de lourdes traces aux Chrétiens et aux Libanais en général. Ses dernières positions, calquées sur la politique des forces libanaises confirment une trajectoire délibérément prise, visant à maintenir une division au sein de la communauté chrétienne.

Pourvu que son successeur redonne à l’Eglise maronite son rôle unificateur et porté vers la foi, ainsi que l’enseignement et la mise en application du message du Christ. Gageons enfin qu’il épargnera l’Eglise et toutes ses institutions du sale jeu politique afin qu’il regagne la confiance des Chrétiens, de tous les Chrétiens. Source Mouvement pour le Liban