Titre

Les Coptes : histoire des chrétiens d’Égypte

Sous titre

Dossier de la revue Le Monde de la Bible, n°231

Auteur

Benoît de Sagazan, sous la dir. de

Type

livre

Editeur

Montrouge : Bayard, déc. 2019 - févr. 2020

Nombre de pages

52p.

Prix

15€

Date de publication

11 avril 2020

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Les Coptes, histoire des chrétiens d’Egypte

Ce dossier du Monde de la Bible n°231, sur les coptes, retrace, en neuf articles, l’histoire de ces chrétiens et du christianisme en Égypte. « De tous les chrétiens du monde arabe, les coptes sont les plus nombreux : entre 6% et 10% de la population égyptienne. »

Dans le premier article, Christian Cannuyer1 nous accompagne dans un voyage à travers l’histoire des Coptes des origines au XIXe siècle. Partant des Actes des apôtres (Ac 18,24-28), il montre que l’Eglise d’Egypte s’enracine dans les origines même du christianisme et que vers l’année 55, il y avait déjà des chrétiens à Alexandrie. Il évoque l’église d’Alexandrie, au 2ème siècle, et sa célèbre école de théologie, le Didascalée2, au cœur des grands débats théologiques. Et enfin il présente l’histoire des coptes sous l’Empire byzantin puis sous la domination musulmane en rappelant que les chrétiens d’Égypte ont été souvent brimés par les deux pouvoirs. Mais « après la conquête musulmane, l’Eglise d’Egypte est parvenue à préserver un riche patrimoine humain et spirituel, jusqu’à l’aube de la modernité. »

Dans son article suivant, intitulé La Sainte Famille : traditions et dévotions égyptiennes, Christian Cannuyer3 montre que les coptes considèrent l’Égypte comme une « terre sainte » car l’Enfant Jésus et sa Famille y ont résidé pendant trois ans et demi lorsqu’ils durent fuir la Palestine à cause de la fureur meurtrière d’Hérode. Et toute une géographie s’est progressivement mise en place situant les étapes de leur séjour égyptien, qui sont, aujourd’hui encore, des lieux de pèlerinage et de dévotion. Un de ces lieux de pèlerinage et le plus célèbre en Égypte est le monastère de Deir Durunka, près d’Assiout : il draine des dizaines de milliers de fidèles coptes orthodoxes et catholiques. Le site est traditionnellement reconnu comme l’étape la plus méridionale du séjour de la Sainte Famille en Égypte. Ce pèlerinage a lieu chaque année, au mois d’août.

Tito Orlandi4 traite, dans le troisième article, de la littérature copte, Une littérature originale, théologique et spirituelle, expliquant que lorsque l’on parle de littérature copte, c’est-à-dire de l’ensemble des textes littéraires écrits dans la langue « copte », héritière de l’égyptien ancien, on se réfère à un corpus dans lequel l’aspect strictement littéraire est subordonné à l’aspect religieux. L’auteur montre que les textes liés à la théologie et à la spiritualité chrétiennes forment presque la totalité de la littérature copte. Ensuite l’article aborde les conséquences du concile de Chalcédoine (en 451) pour la littérature copte où, après la scission5, s’exprime le besoin de construire une culture historique et spirituelle typiquement copte, par opposition à celle soutenue par le gouvernement central de l’Empire byzantin.

Avec Esther Garel6, nous abordons Les Pères du désert et l’invention du monachisme né en Égypte au tournant du IVe siècle. Le monachisme égyptien a pris des formes très variées, inspirées par de grands modèles ascétiques. Deux grands mouvements monastiques sont nés en Egypte : l’érémitisme – vie solitaire dans le désert – associé au nom de saint Antoine le Grand (251-356)7 et le cénobitisme – vie communautaire – initié par saint Pacôme (vers 292-348)8. « L’érémitisme et le cénobitisme constituent les deux extrémités d’un spectre entre lesquelles ont existé de multiples formes de vie ascétique »9. Aujourd’hui encore le monachisme est un des piliers de l’Eglise copte.

Dans le cinquième article intitulé Images et symboles : un vocabulaire biblique, Julien Auber de Lapierre10 note qu’« à partir du IIIe siècle, un premier art fait de symboles et de signes se développe en Égypte comme dans le reste de l’Empire. Un vocabulaire commun se construit et ne laisse guère encore la place à des particularités locales. » Un exemple : la catacombe de Karmouz, à Alexandrie, détruite à la fin du XIXe siècle, dont les décors avaient été peints entre les IIIe et VIIe siècles, était le plus ancien témoin de l’existence de cet art. Dès le Ve siècle, un « plan théologique » de l’iconographie murale était établi en fonction des espaces liturgiques de l’édifice ecclésial. Enfin, pendant la période ottomane, se produit une évolution capitale de l’art chrétien en Egypte à partir du XVIIe siècle, renouvellement qui se confirme au XVIIIe siècle avec l’art de l’icône qui supplante alors la peinture murale dans les églises.

Quant à la culture copto-arabe, Adel Sidarus11, en souligne le rayonnement, dans le 6e article intitulé XIIIe siècle, âge d’or d’une culture copto-arabe. Il montre comment l’universalisme et la richesse trop méconnus de cette culture sont une belle illustration de la possibilité d’une interfécondation culturelle et religieuse entre islam et christianisme et rappelle la célèbre rencontre à Damiette de François d’Assise avec le sultan al-Malik al-Kâmil, en 1219.

Avec le septième article de ce dossier nous sautons du Moyen-Age à l’époque contemporaine. Dans son article Être copte dans l’Égypte contemporaine, Gaétan du Roy12 nuance fortement la vision selon laquelle on présente souvent les coptes comme les héritiers d’un christianisme enraciné dans la plus haute antiquité, qui, persécutés par les islamistes, accueillent avec reconnaissance la protection du pouvoir. Pour l’auteur, « ces idées ne sont pas dénuées d’une part de vérité mais elles occultent des pans importants de la réalité vécue par les coptes » (p.68) et de leurs relations contrastées avec le pouvoir.

Dans le plus court article, le huitième du dossier, Gérard Billon13, du Service biblique Evangile et Vie, propose une lecture biblique – intitulée Fuir, revenir – sur la fuite en Egypte de Joseph, prenant avec lui l’enfant Jésus et sa mère « car Hérode va rechercher l’enfant pour le faire périr » (Mt 2, 13-15). Dans la longue histoire des relations entre Dieu et son peuple, l’Egypte est à la fois terre de refuge et terre de malheur.

Enfin, le frère Jean Druel14 clôt ce passionnant dossier par un article intitulé Les jeunes sont nombreux à réclamer une citoyenneté non-religieuse, dans lequel il observe le désir d’une partie de la jeunesse égyptienne de s’émanciper du carcan politico-religieux toujours très fort dans le pays. Pour lui, plusieurs facteurs concourent à la progression de l’indifférentisme religieux chez les étudiants du Caire ou d’Alexandrie : la montée de l’individualisme, le rejet de la violence commise au nom de la religion, le rejet aussi des autorités religieuses…

Si les Coptes orthodoxes sont majoritaires parmi les chrétiens d’Egypte15 – les 200.000 catholiques formant la minorité des minorités -, je tiens à souligner, en terminant, que la relation entre les deux églises est bonne actuellement : tout se passe bien et il y a beaucoup de projets communs. Quant à la relation entre les chrétiens d’Égypte et les musulmans : dans les villes ils vivent ensemble en paix mais de temps en temps il y a des conflits à cause de fanatiques musulmans. Mais dans les villages, la situation est différente : il y a des villages dont tous les habitants sont chrétiens et des villages dont tous les habitants sont musulmans mais il y a aussi des villages où les chrétiens vivent avec les musulmans.

Fr.Mina-Athanase ABDELMESEH SAID O.P

(frère dominicain, copte)

 

Notes de la rédaction

1 Egyptologue et spécialiste des coptes. Professeur à la Faculté de théologie de Lille ; directeur de Solidarité-Orient (Bruxelles).

2 En savoir plus sur le Didascalée, prestigieuse Ecole d’Alexandrie.

3 Ecouter Christian Cannuyer sur Le culte de la Sainte Famille en Egypte, dans l’émission Chrétiens d’Orient où il était l’invité de Sébastien de Courtois, le 15/12/2019 (durée : 23 mn).

4 Professeur émérite de langue et de littérature coptes à l’Université La Sapienza, Rome.

5 Quand le concile de Chalcédoine (451) en vint à proclamer « deux natures », humaine et divine, dans la personne du Christ […] les Egyptiens dans leur grande majorité, évêques, moines, fidèles, désavouèrent le concile […]. L’Eglise d’Egypte se sépara de celles de Constantinople et de Rome, entraînant dans son sillage une bonne partie de l’Eglise de Syrie, mais aussi l’Eglise d’Ethiopie […] et, plus tard, l’Eglise d’Arménie : ainsi se constituèrent les Eglises « non chalcédoniennes » […] appelées aujourd’hui « les anciennes Eglises orientales ».

6 Maîtresse de conférences à l’Université de Strasbourg, Institut de papyrologie.

7 En savoir plus sur saint Antoine le Grand.

8 En savoir plus sur saint Pacôme.

9 Cf. les Apophtegmes des Pères du désert, recueil de sentences ou de courtes histoires relatives à des moines célèbres. A lire aux éd. du Cerf : Les Apophtegmes des Pères, vol. I.- (Sources chrétiennes ; 387) et vol. III.- (Sources chrétiennes ; n°498).

10 Docteur en histoire de l’art, chargé du cours d’archéologie chrétienne, Ecole du Louvre.

11 Professeur émérite à l’Université d’Evora et à l’Université catholique de Lisbonne.

12 Professeur invité à l’Université Saint-Louis (Bruxelles).

13 Bibliste, membre du Service biblique catholique Évangile et Vie, enseignant à l’Institut Catholique de Paris.

14 Dominicain et directeur, au Caire, de l’Institut dominicain d’études orientales (IDEO).

15 Sur les coptes, on trouvera sur notre site la recension des livres suivants : Voyage en Haute Égypte. Prêtres, coptes et catholiques / Catherine Mayeur-Jaouen.- CNRS éditions, 2019 ; Les coptes d’Egypte / Laure Guirguis.- Karthala, 2012 ; Arabes chrétiens : l’histoire méconnue / Le Monde de la Bible n°222.-Bayard, 2017 ; Chrétiens d’Orient : périple au cœur d’un monde menacé / Vincent Gelot ; préface de Mgr Pascal Gollnisch.- Albin Michel, 2017 ; Les chrétiens d’Orient / Bernard Heyberger.- PUF, 2017.-(Que sais-je ? ; n°4050) … etc.

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