Actualité de Gaza : entretien avec Rony Brauman, l’UJFP solidaire de la population, la stratégie israélienne de la faim.

Alors que les conséquences de la guerre à Gaza secouent les universités américaines et, par contre-coup, certaines institutions universitaires en France, il faut plus que jamais être attentif au peu d’information qui filtre à travers l’écran de l’occupation israélienne. Laurent Baudoin, des Amis de Sabeel-France, en est un relais précieux.

-Il nous signale un entretien d’une heure avec Rony Brauman sur le conflit israélo-palestinien – mené par Elba Rahmouni. Rony Brauman est médecin, ancien président de Médecins sans frontières.

En voici le sommaire.

00:00 Partie 1 : Lecture historique et politique du conflit israélo-palestinien

10:42 Partie 2 : L’attaque israélienne à Gaza : un génocide

28:29 Partie 3 : Le droit de se défendre invoqué par Israël

30:56 Partie 4 : Le siège d’une population

36:40 Partie 5 : Le sort des prisonniers

42:12 Partie 6 : L’utilité du droit humanitaire

53:13 Partie 7 : La possibilité d’un cessez-le-feu

-o-

Nous relayons aussi les initiatives de solidarité avec la population de Gaza de nos amis de l’Union Juive Française pour la Paix (UJFP), que Laurent Baudoin fait connaître en France.

“L’UJFP est présente depuis des années dans le sud de la bande de Gaza, près de Khan Yunis, où elle a réalisé, avec le concours de la population locale, des installations pour les agriculteurs (dont un château d’eau et une pépinière de jeunes plants), aujourd’hui détruites par l’armée d’occupation israélienne.
L’UJFP est active dans l’aide aux réfugiés et aux déplacés, menacés par la famine depuis la nouvelle guerre israélienne.
Elle nous montre où se trouve le véritable humanisme juif ancestral.

ִמ ְצָ֑ריִם ְבֶּ֣אֶרץ ֱהיִיֶ֖תם ִכּֽי־גִֵ֥רים ָכּ֔מֹוךָלֹ֙ו ְואָ ַה ְבָ֥תּ ִא ְתֶּ֗כם ַהָ֣גּר ַהֵ֣גּר׀ ָלֶ֜כםיִ ְה֨יֶה ִמ ֶכּ ֩ם ְכּ ֶאזְָ֣רח

“L’étranger qui séjourne parmi vous sera pour vous comme un des vôtres ; tu l’aimeras comme toi-même ; car vous avez été étrangers dans le pays d’Égypte.” (Lévitique 19,34)

in Emmanuel Lévyne, Judaïsme contre sionisme, Editions de l’échelle du temple, coll. Judaïsmes, sept. 2022 (1re éd : 1969)”

Voir les photos et vidéos de la préparation et de la distribution des repas (notamment aux enfants) :

UJFP
21 ter rue Voltaire
75011 Paris
Téléphone : 07 81 89 95 25

-o-

-Notre partenaire le CCFD-Terre solidaire (Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement) est en relation avec une ONG palestinienne de Gaza, qui constate que la famine à Gaza est organisée et fait partie de la stratégie israélienne.

La faim à Gaza, une stratégie israélienne

Publié le 24.04.2024| Mis à jour le 29.04.2024

Il y a les chiffres, froids, objectifs et terribles. 1, 1 million de personnes dans la bande de Gaza, soit près de la moitié de la population sont en risque imminent de famine à Gaza.

Il y a les images, insoutenables. Des visages émaciés, des membres squelettiques, des yeux immenses et vides de joie, des corps, enfin, qu’on devine trop légers, dans des linceuls blancs.

Il y a le constat : cette famine qui menace, qui est peut-être déjà là, est provoquée. Sciemment organisée.

Les autorités israéliennes se servent de la faim à Gaza comme d’une monnaie d’échange : les otages, enlevés le 7 octobre lors de l’attaque meurtrière du Hamas, contre l’assistance humanitaire.

Des familles piégées par la faim

Il y a les témoignages. Comme celui d’une famille bloquée au nord de la bande de Gaza recueillis par notre partenaire CDMC (Community development and media center), ONG palestinienne partenaire du CCFD-Terre solidaire dans la bande de Gaza.

Les témoignages de la vidéo ont été recueillis par notre partenaire CDMC dans le Nord de la Bande de Gaza

Andaleeb a recueilli un autre témoignage

Andaleeb, écrivaine et journaliste membre du CDMC, est réfugiée en Egypte. Elle est en contact fréquent avec sa collègue Hanane qui, elle, est restée dans le nord de la bande de Gaza.

C’est par Andaleeb, que nous suivons la quête quotidienne de Hanane, restée dans le nord de la bande de Gaza, pour nourrir sa famille. Hanane a été déplacée trois fois par les opérations militaires.

Un blocus délibéré

De maison en maison, de semaines en semaines, le stock de nourriture a fondu. « Ils ont d’abord fait le plein de boîtes de conserve, de riz, de pâtes, de légumes, qu’ils ont achetés au marché. C’était au tout début. Ils pensaient tenir », raconte Andaleeb. Mais la guerre a duré. Il fallait nourrir huit personnes : Hanane elle-même, son mari, ses deux fils, sa fille, son gendre et ses enfants, de 9 et 7 ans. Rapidement, il n’est plus resté que du riz. Et puis le riz lui-même a été fini.

« Alors ils sont allés cueillir de la mauve, reprend Andaleeb. C’est une herbe que nous mangions avant la guerre en salade. Elle pousse partout, surtout après la pluie. » Mais d’autres affamés ont eu la même idée, et la mauve est devenue rare.

Ils réussissent, parfois, à trouver de la farine. Soit grâce à un des rares camions autorisés à entrer dans le nord de la bande de Gaza, soit dans les semblants d’épicerie, quelques aliments vendus sur un morceau de trottoir.

Dans ce cas, la farine est au prix de l’or. 150 shekels le kilo, soit 37 €. « Avant la guerre, un kilo de la farine très haute qualité coûtait 1,5 € », compare Andaleeb. Un temps, ils ont mélangé cette si précieuse farine à de la farine pour animaux, à base de foin, pour faire du pain. Les enfants n’en voulaient pas. Ils préféraient le mets de choix que leur réservaient les adultes : un peu de maïzena dans de l’eau avec du sucre. Mais ils n’ont pas eu le choix. La maïzena elle aussi est venue à manquer.

Avant Ramadan, Hanane a réussi à atteindre les locaux du CDMC. Les militaires israéliens s’étaient retirés de la zone. Elle savait pouvoir y récolter un peu de sucre, du café, des boissons, tout ce qui, avant, servait à la vie de bureau. Pour la fin du mois sacré, Hanane a acheté, une fois, des fèves fraîches. Une seule fois : elles étaient à 20€ le kilo. Elles venaient de Gaza, d’une de ces parcelles que les paysans s’obstinent à cultiver, malgré le danger. Et dont ils vendent très cher la toute petite production.

L’assassinat des sept employés de l’ONG World central kitchen le 1er avril par des tirs de missiles israéliens, suivie de la grosse colère américaine, a obligé les autorités israéliennes à desserrer un peu le blocus. Le Cogat, l’administration militaire israélienne chargée des affaires civiles dans les territoires occupés palestiniens, affirme que trois boulangeries ont ouvert dans le nord de la bande de Gaza. Mais c’est d’un flot d’aide dont les Gazaouis ont besoin.

Ce ne sont pas les parachutages qui vont satisfaire les besoins, même les plus urgents. « Beaucoup de palettes ont atterri sur le territoire israélien, dans la mer, ou près de check points israéliens. Les gens se faisaient tuer en cherchant à récupérer des caisses, ou alors se sont noyés », déplore Andaleeb.

Un appel à l’aide contre la faim à Gaza

Hanane et ses proches souffrent de maux de ventre, de diarrhée chronique dus à une nourriture en quantité et en qualité insuffisante. « Ils ont les visages tout gris. Il n’y a plus de sang sous la peau. Ils sont faibles », se désole notre interlocutrice.

Au sud de l’enclave, où s’entassent 1,3 million de Gazaouis, l’insécurité alimentaire est un peu moins aiguë. Personne n’y mange à sa faim cependant. Tous les moyens de production de nourriture ont été détruits. La population dépend entièrement de l’assistance humanitaire, qui entre par camions, et donc des autorisations délivrées par l’administration israélienne.

Crédit photo : Nour Arafa/CCFD-Terre Solidaire

Voir ici la totalité de l’article, paru dans la newsletter du CCFD-Terre Solidaire.