Bloc-notes du 8 juillet 2011 de Jean Claude Petit Président du réseau Chrériens de la Méditerranée.
Des mariages princiers aux révoltes arabes, des faits divers retentissants aux crises financières inquiétantes, le brouhaha de l’actualité nous donnerait presque le vertige. C’est pourquoi, en ce début d’été, je vous propose non seulement de souffler un peu mais de partir à la rencontre d’une caravane bigarrée trop souvent oubliée : celle d’hommes et de femmes qui, seuls ou en cordée, loin du bla-bla des beaux parleurs de toutes espèces, s’efforcent de mettre en musique les convictions qu’ils tiennent de leur foi. Patiemment, courageusement, artisans de justice et de paix, cent fois sur le métier ils remettent leur ouvrage.
A tout seigneur tout honneur ! Commençons notre voyage par les anonymes, voulez-vous. Je pense à ces membres du Secours catholique engagés de longue date dans l’accompagnement des migrants de Calais, moins nombreux certes qu’en 2009, mais toujours victimes de multiples atteintes à leur dignité. A ces religieuses et à ce prêtre de Tunisie accueillant, à la frontière de leur pays déjà éprouvé, les réfugiés arrivant par milliers de Libye. A ces chrétiens italiens de la communauté de Sant’Egidio prenant en charge deux mille des Roms vilipendés par l’Europe entière, proposant au pape de les recevoir et se rendant avec eux récemment au Vatican. A ces accompagnateurs œcuméniques qui, à Jérusalem-Est, Bethléem, Hébron soutiennent et protègent les Palestiniens et les Israéliens dans leurs actions non violentes et leurs efforts pour la réalisation d’une paix juste au Proche-Orient.
Immense, interminable galaxie à laquelle il convient d’ajouter, pour l’exemple, quelques noms plus connus. Celui du père Pedro qui, à Madagascar, avec sa Fondation, a bâti dix sept villages, plus de trois mille maisons, une trentaine d’écoles. Et qui, aujourd’hui, lance, pour son pays d’adoption, un appel au secours à l’Union européenne et à la communauté internationale. Ou celui du député UMP des Yvelines, Etienne Pinte, ancien maire de Versailles, qui fait de la lutte contre la pauvreté et de l’accueil des étrangers son combat quotidien, au nom de sa foi. Ou bien encore celui de François Soulage, président du Secours catholique, auteur avec la théologienne Geneviève Médevielle, d’un petit livre incisif et vigoureux intitulé : « Immigration : pourquoi les chrétiens ne peuvent pas se taire », publié à l’Atelier.
Mais le plus novateur, dans cet investissement multiforme au service de la justice et de la paix, est sans aucun doute, le soutien sans équivoque à la Flottille de la liberté en route vers Gaza que viennent d’apporter le CCFD-Terre solidaire, Pax Christi France, l’ACAT, la Famille franciscaine séculière, Chrétiens de la Méditerranée et la Cimade. Plus novateur encore, cette initiative non violente mise en œuvre pour relancer la mobilisation en vue d’un avenir commun pour Israéliens et Palestiniens a reçu l’appui de plusieurs évêques et pasteurs protestants connus, en même temps que celui de nombreuses personnalités chrétiennes dont Jean Boissonnat, Sylvie Germain, Etienne Pinte… Invitant les chrétiens à se joindre à cette initiative, les responsables concernés écrivent : « Avec vous, nous voulons partager la Béatitude de la paix : « Heureux ceux qui font œuvre de paix ; ils seront appelés fils de Dieu ». Il s’agit bien de “faire œuvre”… pas seulement de dire « Paix ! Paix ! ». Et par conséquent d’en prendre le risque. Or la paix ne peut dépendre ni de l’usage délibéré de la terreur, ni de l’humiliation, ni de la misère, mais en l’occurrence de la recherche passionnée d’un avenir commun entre Israéliens et Palestiniens, dans le respect mutuel, dans l’application du droit et dans la quête de la justice. »
On feint trop souvent d’ignorer, dans la société française, particulièrement dans le monde politique et celui des grands médias audiovisuels, à quel point les chrétiens et leurs grandes organisations contribuent à créer du lien social et à œuvrer pour plus de justice, de solidarité et de paix. Le faire savoir n’est pas vanité. Les 50 ans du CCFD-Terre solidaire fêtés avec un immense succès dans toutes les régions françaises viennent utilement de le rappeler à l’attention de tous. Délégué général de cette belle et grande ONG chrétienne, Bernard Pinaud s’inspirant de Dom Helder Camara écrivait récemment : « Le rêve d’un monde plus juste et fraternel, c’est le rêve de Dieu lui-même ». On ne saurait mieux dire.
Jean-Claude Petit
N.B. : Texte publié dans « La Voix de l’Ain » du 7 juillet 2011