Solidarité avec les chrétiens de Palestine

La dernière Université d’Hiver de Chrétiens de la Méditerranée[1] et le colloque des Amis de Sabeel[2] ont été l’occasion de faire émerger une autre facette de la Palestine, très peu visible ou plutôt peu mise en avant dans les médias en France : les chrétiens. Leurs témoignages nous interpellent. Ils se proclament palestiniens avant tout. Ils partagent en commun avec les musulmans la culture, la langue et la cause palestiniennes. Ils souffrent comme tout le peuple palestinien.

Les chrétiens de Palestine en danger

Ils vivent enfermés dans un territoire fractionné par les check-points de l’armée israélienne et jonché de colonies israéliennes en Cisjordanie. L’occupation israélienne se manifeste par des restrictions de mouvement. Il leur est impossible de sortir du territoire pour aller à Jérusalem sur les lieux de cultes ou rencontrer leur famille.

Le colloque des Amis de Sabeel a dressé un saisissant tableau économique de la situation. Les conséquences du conflit ont un impact palpable sur l’emploi et le degré de pauvreté des communautés chrétiennes. Le taux de chômage se situe entre 25 à 30 % selon les villes. Les menaces d’impositions foncières des propriétés religieuses par la municipalité de Jérusalem ont pour but de déposséder les divers patriarcats de leur patrimoine immobilier. Le 28 novembre, le Patriarcat latin de Jérusalem s’est opposé par un communiqué à l’appropriation par l’armée israélienne, la veille, de 25 hectares de terrain lui appartenant. Israël souhaite diviser le pays pour transformer le conflit politique en un conflit religieux avec la loi sur “l’État-nation du peuple juif” et l’hébreu comme langue officielle. Face aux difficultés de la vie quotidienne, aux interdits d’Israël, les chrétiens sont en danger. Ils vacillent. Nombreux ont immigré pour une vie meilleure. Les chrétiens palestiniens disparaissent de plus en plus.

Le rôle des chrétiens en Palestine

Malgré leur faible poids (environ 1,5 % de la population palestinienne), les chrétiens sont présents dans la vie politique. Ils occupent notamment des responsabilités dans des mairies. Les chrétiens jouent aussi un rôle important dans le secteur de l’éducation. Orientées sur la non-violence pour accéder aux justices, les écoles chrétiennes sont fréquentées principalement par des musulmans. La présence de communautés chrétiennes actives et des sièges d’églises à Jérusalem donnent encore une espérance pour le maintien des chrétiens. Ils veulent rester sur leur terre, celle de leurs racines. Leur présence est y indispensable pour l’équilibre et la diversité des communautés.

Soyons les colibris de la paix

Les chrétiens aspirent à un avenir meilleur. Comme l’a rappelé Jamel Khader lors du colloque des Amis de Sabeel, « le plus urgent (pour la population palestinienne), c’est le présent et le futur de la Palestine ». Il faut épauler ceux qui sont restés en Cisjordanie, encourager au retour ceux qui en sont partis, collecter des aides pour financer leurs projets. Ils ont besoin d’être soutenus par tous dans la lutte qu’ils mènent pour la reconnaissance de droits élémentaires dont ils sont privés. Chrétiens de la Méditerranée se donne pour mission de participer par tous les moyens à la prise de conscience de leurs conditions de vie.

Les travaux de l’Université d’Hiver ont mis en évidence l’impossibilité de voir advenir de l’extérieur du Proche-Orient une solution au conflit. Un dialogue direct et authentique entre Palestiniens et Israéliens est dès lors plus que jamais la condition fondamentale à l’élaboration de celle-ci. Cette démarche doit être soutenue par la communauté internationale, ce qui suppose enfin la reconnaissance de l’État de Palestine comme le prévoit expressément la Résolution 181 de l’Assemblée générale des Nations Unies, adoptée il y a 71 ans.

Nous demandons donc à la France et à l’Union Européenne qu’elles reconnaissent l’État de Palestine, comme l’ont déjà fait plus de 70 % des États représentés à l’ONU. Le Saint Siège en fait partie, qui ne cesse de défendre une solution à deux États. Ce serait une initiative hautement symbolique et un message d’espoir adressé aux Palestiniens qui aspirent à disposer d’eux-mêmes et à vivre en paix dans leur pays.

Patrick Gérault,
président de CDM

 

[1]“Jérusalem au cœur de la Méditerranée”, thème de l’université d’Hiver de Chrétiens de la Méditerranée, Annecy, du 30 novembre au 2 décembre 2018.

[2] “Israël dans la Bible et l’État d’Israël aujourd’hui”, thème du colloque des Amis de Sabeel, Paris, 24 novembre 2018.

Image : Église de la Nativité, Bethléem, Matson Collection, ca. 1898-1946 (Bibliothèque du Congrès, É.-U.),