Titre

Pourquoi l’Empire ottoman ?

Sous titre

Six siècles d’histoire

Auteur

Olivier Bouquet

Type

livre

Editeur

Paris : Gallimard, 2022

Collection

Folio. Histoire ; 328

Nombre de pages

553 p.-[16] p. de pl.

Prix

11,20 €

Date de publication

31 décembre 2023

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Pourquoi l’Empire ottoman ? Six siècles d’histoire.

Chassés d’Asie centrale par l’expansion des Mongols, les ancêtres des Ottomans1 se sont installés en Anatolie dans la première moitié du XIe siècle. Les Grands Seljouqides s’emparent de l’Iran, de l’Irak, de la Syrie. En 1326, Orhan conquiert Bursa, première capitale ottomane. En 1369, Edirne conquise deviendra la deuxième capitale. La principauté ottomane, apparue au lendemain des croisades, absorbe en deux siècles les Etats turquifiés qui l’entourent. En 1453, Mehmed II s’empare de Constantinople et en fait sa capitale. En 1512, 55% de la population ottomane vit à l’ouest d’Istanbul. En 1517, la prise du Caire transfère à Istanbul le siège du califat. Les Ottomans menaceront Vienne en 1529 et 1683. Sous Sélim II (1566-1574), l’Empire atteint son extension maximale.2

Cependant, de 1618 à 1909, 7 sultans sur 21 sont détrônés. La désintégration de la société vient du fait que les impôts sont affermés à des militaires et que les Janissaires, autrefois armée d’élite, se consacrent désormais à l’exploitation de commerces urbains. A partir de 1839, sont proclamées des réformes ou “tanzimat” puis une Constitution que le Sultan Abdulhamid suspendra en 1878. En 1909, le Comité Union et Progrès, dirigé par la triarchie puissante de Talat, Enver et Jemal Pacha, alliée de l’Empire allemand, le destitue.3 En 1920, le Traité de Sèvres démembrant l’Empire ottoman est rectifié par le Traité de Lausanne (1923), l’Europe ayant besoin de la Turquie pour lutter contre les Soviets. Atatûrk fait voter la fin du Sultanat en 1922 et celle du Califat en 1923.

L’islam devient la religion dominante de l’Asie Mineure entre les XIIe et XIVe siècles. Les sultans se réfèrent au califat abbasside. Le Mufti d’Istanbul, Cheikh al Islam, dirige la cléricature, qui exerce au XVIIe siècle un poids considérable. L’islam confrérique est également populaire4. L’architecte Sinan imite Sainte-Sophie qui deviendra le modèle architectural des mosquées ottomanes. Le patrimoine des hommes est cinq fois supérieur à celui des femmes et la séparation des époux est favorable aux hommes.

La glorification de la nation nourrit les violences envers les non-musulmans. Les chrétiens sont des sujets de seconde zone comme les Kurdes et les Alevis et soumis à la violence des régimes sécuritaires d’Istanbul puis d’Ankara. Pourtant, l’élite de l’armée, les Janissaires, était formée de chrétiens des Balkans enlevés jeunes et dont certains étaient intégrés dans l’Administration. Au XVIe siècle, les hauts dignitaires ottomans étaient d’origine chrétienne. Aux XVIIe et XVIIIe siècles, Serbes, Arméniens, Grecs profitent des  Capitulations, traités signés avec la France, l’Autriche, la Russie qui les protègent. Les chrétiens ont ainsi un important essor démographique. En 1911, la majorité des mille marchands enregistrés à Istanbul, étaient chrétiens5.

Mais des massacres commenceront en 1860 à Damas et au Liban, se poursuivront dans l’Est anatolien6. En 1914, l’Empire compte 1,5 million d’Arméniens, 3 millions de Grecs. En 1927, il reste 77 433 Arméniens pour la plupart à Istanbul. Les Grecs ne sont plus que 2 000 actuellement. Les Juifs avaient également subi des mesures confiscatoires et des expulsions.

Aujourd’hui le Parti AKP (Justice et Développement) délaisse le kémalisme, qui avait institué la laïcité d’État, pour renouer avec le passé impérial, l’architecture néo-ottomane. Le Président Erdogan,  qui soutient les Frères Musulmans, veut refonder la Turquie en une grande puissance islamique conservatrice.

Le lecteur appréciera la richesse des annexes de l’ouvrage7.

Christian Lochon

Membre de l’Académie des Sciences d’Outre-Mer,
Administrateur de Chrétiens de la Méditerranée,
Ancien administrateur de L’Œuvre d’Orient.

1 Ottomans, descendants d’Osman (1299-1324) qui forment la dynastie Osmanlie laquelle durera dans la même famille jusqu’en 1923.

2 3 millions de km2, 12 000 km de côtes continentales.

3 Ce sont eux – chefs du mouvement Jeunes-Turcs, officiellement connu sous le nom de Comité Union et Progrès -, qui organiseront le génocide des Arméniens et d’autres chrétiens de l’Empire en 1915.

4 L’Ordre Khalvati adopté par les Ulémas soutient les conquêtes militaires. Les janissaires étaient affiliés aux Bektachis. A la fin du XIXe siècle, Istanbul compte 57 couvents qadiris, 56 naqchbandis.

5 En 1919, 73% des manufactures d’Istanbul appartiennent à des Grecs et 85% de leurs employés sont grecs.

6 Entre 1860 et 1914, un million d’Ottomans, la plupart chrétiens, s’exilent en Amérique.

7 Particulièrement les cartes exprimant l’agrandissement puis le rétrécissement de l’Empire ottoman, les illustrations commentées, le lexique turc, les repères chronologiques, la volumineuse bibliographie, les index nominum et locorum.

Note de la rédaction : Olivier Bouquet, Professeur d’histoire moderne et contemporaine à l’Université Paris 7 – Paris Diderot, était l’invité de Patrick Boucheron dans l’émission Histoire de, sur France inter, dimanche 4 juin 2023 : Le futur passé des Ottomans (35.49 mn). Il est rejoint, dans la seconde partie de l’émission, par Emmanuelle Tixier du Mesnil, Professeure d’histoire du Moyen Âge à l’Université Paris Nanterre et Thierry Sarmant, Conservateur général aux Archives nationales.

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