Titre

Passion arabe

Sous titre

Journal 2011-2013

Auteur

Gilles Kepel

Type

livre

Editeur

Gallimard, mars 2013 (réed. 2016)

Collection

Collection Folio actuel (n° 164)

Nombre de pages

656 p.

Prix

10,20 €

Date de publication

28 novembre 2013

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Passion arabe

Gilles Kepel,[1] est spécialiste du monde arabe et de l’islam contemporain ; son nouvel ouvrage Passion arabe nous livre le récit de deux années qui l’ont vu parcourir en tous sens cet univers, traversé par les révolutions, où l’Islam politique s’exprime de plus en plus fortement.

« Il faut être modeste et patient, nous dit l’auteur, se garder de toute synthèse définitive. Voilà pourquoi j’ai opté pour la forme ouverte du journal. Les révolutions arabes, c’est de l’histoire en train de se faire. ». Commencé en 2011, avec les débuts des troubles en Syrie et de l’intervention occidentale en Libye, l’ouvrage nous conduit dans tous les pays touchés par les révolutions et se termine en octobre 2012 sur la frontière de la Syrie en guerre.

Le texte se lit comme un passionnant récit de voyage rempli d’appréciations pittoresques ; il nous permet de repérer, à travers la diversité des pays et des histoires, les « phénomènes de concomitance, de capillarité » qui se manifestent actuellement au Moyen Orient.

Deux séjours en Égypte et en Tunisie à quelques mois de distance  permettent de mieux comprendre l’évolution de ces pays où les défenseurs des droits de l’homme se trouvent pris dans la tension entre religion traditionnelle et islamismes : Universités coraniques historiques et Islam soufi populaire s’y trouvent remis en question par l’islamisme politique et radical. Les Frères musulmans ont pris le pouvoir tandis que jeunes et masses appauvries mettent leur espoir dans le radicalisme salafiste.

Au Liban, en Syrie, dans les États du golfe, pays de création plus récente, des allégeances plus fondamentales que le nationalisme persistent : le fait d’être alaouite, chiite, maronite ou sunnite, kurde ou arabe vient compliquer le jeu et permettre des solidarités et influences transnationales.

Une véritable guerre pour le contrôle de l’islam sunnite oppose « l’Égypte gonflée de la plus grosse population pauvre de la région et riche de son histoire multi millénaire et l’Arabie saoudite aussi dispendieuse des revenus de ses hydrocarbures pour promouvoir sa vision de l’Islam qu’elle est démunie culturellement. » De son coté, le richissime Qatar tisse son réseau, parrainant tantôt les Frères musulmans tantôt les salafistes pour trouver sa place entre le « monolithe saoudien » et le géant iranien.

« Sur la ligne de faille avec les chiites au Moyen Orient, la Turquie fait figure de seule grande puissance sunnite capable de concurrencer l’Iran »

Kepel rend compte des positions de ses interlocuteurs dans toute leur complexité et souvent leur ambiguïté. Sa volonté de neutralité n’empêche cependant pas l’empathie de ses portraits allègres voire parfois drôles

Pour situer les évènements dans l’histoire, il mobilise ses souvenirs nostalgiques de visites plus anciennes voire de ses rencontres avec les pères des chefs actuels des factions opposées. On a un peu de mal à s’accrocher aux combinaisons politiques changeantes, mais la verve du conteur fait passer l’imbroglio …

Martine Roger-Machart


[1] Gilles Kepel, membre senior de l’institut universitaire de France, professeur à Sciences po, est un politologue, spécialiste de l’islam et du monde arabe. Son premier livre, Le Prophète et le Pharaon : les mouvements islamistes dans l’Egypte contemporaine, a été publié chez Gallimard en 1984, et réédité en 2012 dans la collection Folio Histoire. Il est également l’auteur d’une dizaine d’ouvrages, dont Jihad : expansion et déclin de l’islamisme.-Gallimard, 2003.-2e éd.- (Folio Actuel) et Fitna : guerre au cœur de l’islam.-Gallimard, 2007.-2e éd.-(Folio Actuel)