Titre

Osons la fraternité !

Sous titre

Les écrivains aux côtés des migrants

Auteur

sous la direction de Patrick Chamoiseau et Michel Le Bris ; coordination éditoriale, Christian Séranot-Sauron

Type

livre

Editeur

Philippe Rey, avec le soutien du festival Etonnants Voyageurs, 2018

Nombre de pages

317 p.

Prix

19 €

Date de publication

22 décembre 2018

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Osons la fraternité !

Ce livre mobilise un grand nombre d’écrivains sur la question de l’accueil des migrants, essentiellement dans le cas français. La ligne directrice est bien exprimée dans le titre : « Osons la fraternité », ce qui signifie un plaidoyer pour cet accueil à travers de multiples textes courts (de une à seize pages) témoignant du devoir humaniste de l’accueil, de la richesse de l’apport des migrants à une société, de la difficulté existentielle des migrants, du parcours difficile de l’acte d’émigrer…

Ce sont 29 auteurs qui ont été mobilisés à cette fin par Patrick Chamoiseau et Michel Lebris, ainsi qu’une dessinatrice, Maya Mihindou, à la contribution percutante et originale. On y trouve certains grands noms de la littérature, tel J.M.G. Le Clézio, prix Nobel de littérature ; des historiens : Achille Mbembe, Pascal Blanchard, Patrick Boucheron ; une responsable politique, Christiane Taubira, aux côtés d’autres auteurs moins connus du grand public mais talentueux, au moins pour certains ; je citerai, c’est subjectif : Ananda Devi, Lola Lafon, Felwine Sarr, Sami Tchak….

Il est impossible de résumer la teneur de chacune des contributions, ou de citer tous les auteurs, aussi peut-on essayer de dégager certaines grandes lignes qui traversent ces écrits qui sont romanesques, poétiques, de témoignage, ou de plaidoyer :

Absurdité du refus de l’accueil de migrants et de la signification de ce refus, tel l’écrit de Tahar Ben Jelloun  qui imagine la migration à l’envers des mots de la langue française.

Plaidoyer culpabilisant contre le refus de l’accueil (Achille Mbembe) et honte devant les camps (Raphaël Glucksmann, Chantal Thomas, Lydie Salvayre).

Mise en scène des causes du départ des migrants (Gary Victor).

Aventure de l’acte de migrer, qui aboutit ou finit mal au fond de la Méditerranée.

Vécu de l’intégration et ses difficultés (Velibor Colic, Lola Lafon).

Références historiques, telles que l’opération méconnue dite Wetback visant l’expulsion des USA de migrants mexicains en 1954[1], rapportée par Pascal Blanchard.

Mais – avec encore de la subjectivité de ma part -, le plaidoyer dominant auquel on adhère évidemment pourrait parfois paraître pesant s’il n’intégrait pas aussi les multiples initiatives de la société civile qui agit pour cet accueil et dont témoigne notamment J.M.G. Le Clézio lorsqu’il évoque cet accueil qu’il a vécu dans son enfance en 1943, précisément en ce lieu emblématique aujourd’hui qu’est la vallée de la Roya[2].

Les deux dernières contributions sont remarquables, couvrant des registres très différents : La déclaration des poètes de Patrick Chamoiseau  et Le manifeste pour une mondialité apaisée de Mireille Delmas-Marty, juriste et notamment présidente de l’Observatoire Pharos du pluralisme des cultures et religions[3].

Cet ouvrage remarquable s’adresse à tous les publics aimant la littérature et s’intéressant au vivre ensemble dans nos sociétés. Il est passionnant par sa diversité, on peut y trouver des arguments pour soutenir la cause de l’accueil des migrants, mais aussi des récits plus distanciés sur l’expérience humaine qui est en jeu, parfois même ambigüe, ou plus complexe que les stéréotypes que l’on peut en avoir : c’est ce qui est attendu de la création littéraire et qui la caractérise. La question de la frontière est sous-jacente à ces écrits. L’approche des poètes revendique la suppression des frontières alors que l’on sait que c’est plus compliqué, mais les mots clefs seraient bien : tous différents, interdépendants, solidaires.

Xavier Godard, ouvrage lu à Lomé

 

[1] 1954 Des milliers de ressortissants d’Amérique latine, dont de nombreux sans-papiers, sont expulsés dans le cadre de l’“opération Wetback” (“wetback”, littéralement “dos mouillé”, est le surnom donné aux clandestins qui traversent à la nage le Rio Grande, le fleuve séparant le Mexique des États-Unis) cf. Courrier international du 05/10/2011

[ii] A lire : Roya, l’insoumise : une vallée française prend fait et cause pour les migrants. Lire aussi dans La Croix du 04/01/2017 : Dans la vallée de la Roya, les migrants trouvent refuge

[3] Pour en savoir plus sur l’Observatoire Pharos, cliquer ICI