Titre

Les Romains, les Juifs et Flavius Josèphe

Auteur

Etienne Nodet ; préface de Mireille Hadas-Lebel

Type

livre

Editeur

Paris : Cerf, nov. 2019

Nombre de pages

IV-360 p

Prix

29 €

Date de publication

17 février 2020

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Les Romains, les Juifs et Flavius Josèphe

Au préalable, il convient d’écarter un malentendu : contrairement à la présentation de la 4ème page de couverture, le lecteur ne trouvera pas ici ce qu’il est convenu d’appeler une biographie, ni un ouvrage à lire comme un roman. En revanche, l’auteur, Etienne Nodeti, professeur émérite à l’Ecole biblique et archéologique française (EBAF) de Jérusalem, a longuement fréquenté Flavius Josèpheii et parcouru de long en large l’abondante production littéraire de l’historien du 1er siècle.

Etienne Nodet nous entraîne dans une plongée en apnée et propose de visiter les interstices de deux œuvres de Josèphe : La Guerre juive et Les Antiquités juives. C’est bien là l’intérêt de l’exercice. Cela vaut le coup de tenter l’expérience. Il n’est pas indispensable de se lancer dans une lecture continue, car l’auteur, chapitre après chapitre, resitue les textes commentés dans leur contexte.

L’enseignant de l’Ecole biblique propose à son lecteur, ou plutôt à son auditeur, de prendre de la hauteur historique et géographique. La Judée est reliée à l’ensemble du bassin méditerranéen jusqu’aux confins de la Mésopotamie et de la Perse à l’Orient et de la péninsule ibérique à l’Occident.

L’histoire de la puissance romaine mais aussi de la pénétration de Rome dans les territoires situés à l’Est de la Méditerranée est très condensée. La présentation est cependant très limpide et constitue un précieux memento (Voir notamment : les puissances voisines, pp. 91-109 ; Pompée à Jérusalem, pp.155-163 ; l’héritage de Pompée, pp.169-174 et la politique de César pp. 174-181).

La confrontation mais aussi la rencontre du judaïsme et du pouvoir romain (administratif, fiscal et militaire, culturel aussi) est approchée dans la grande variété des situations constatées, au tournant de notre ère, de Jérusalem à Rome en passant par Alexandrie et par Antioche.

En outre, l’auteur aborde nombre de questions anciennes ou actuelles en débat parmi les exégètes, les historiens, voire les théologiens. L’objectif n’est pas de systématiquement aboutir à une vérité définitive et immuable. Un tel objectif serait plus que prétentieux, parce que l’écriture de Josèphe est souvent imprécise ou confuse et parce que le travail des archéologues comme la recherche des historiens sont toujours renouvelés. Les conclusions présentées chapitre après chapitre laissent une place aux hypothèses ou aux suppositions : en la circonstance, c’est un gage d’authenticité.

Au fil des pages, Etienne Nodet suscite l’intérêt du lecteur en apportant des éclairages nouveaux, notamment sur :

– l’existence d’une première version en araméen de La Guerre Juive, traduite en grec, puis en slavon au 9ème siècle : Etienne Nodet reprend, à frais nouveaux, le débat engagé sur le Testimonium flavianum, texte tardif qui mentionne explicitement la personnalité de Jésusiii.

– le développement de mouvements zélotes à partir de la Galilée : l’auteur restitue la continuité et la cohérence des mouvements d’opposition à l’occupant romain apparus à l’époque d’Hérode le Grand et jugulés à l’époque de l’empereur Hadrieniv.

– l’origine romaine de l’appellation « chrétiens » pour désigner les adeptes d’un christv avant qu’elle ne désigne les membres des communautés chrétiennes

– le contexte de la prédication paulinienne : l’auteur ouvre des perspectives nouvelles sur les circonstances qui ont fait se rencontrer Saul-Paul et les disciples de Jésus, le Galiléen, en Syrie (Antioche).

Au lecteur non spécialiste, il est conseillé de commencer l’ouvrage par les pages de conclusions (pp. 339-353) puis de choisir dans la table le débat jugé prioritaire, selon le moment.

Marc Ameil

iNotes de la rédaction

 Étienne Nodet, dominicain, s’est attelé à une tâche de longue haleine commencée en 1990 : une nouvelle traduction française des Antiquités juives de Flavius Josèphe Il est l’auteur de nombreux ouvrages notamment : Essai sur les origines du judaïsme, Essai sur les origines du christianisme, et La porte du ciel. Les Esséniens et Qumrân : quelles origines ? Quelles postérités ? A voir sur le site du Cerf.

ii Joseph fils de Matthatias le Prêtre plus connu sous son nom latin de Flavius Josèphe né à Jérusalem en 37/38 et mort à Rome vers 100, est un historiographe romain juif d’origine judéenne du Ier siècle. Son œuvre – écrite en grec – est l’une des sources principales sur l’histoire des Judéens du Ier siècle. Elle concerne Les Antiquités juives en particulier, les événements et conflits de son temps entre Rome et Jérusalem. (cf. wikipedia.org). Pour en savoir plus : lire les livres d’Etienne Nodet.

iii Cf. Plusieurs textes de Flavius Josèphe sur Jésus publiés par Etienne Nodet en annexes de son livre : Histoire de Jésus ? Nécessité et limites d’une enquête.- Cerf, 2003

iv Cf. Actes des apôtres 5, 35-37 qui évoquent « les insurrections de Judas Galiléen et de Theudas mentionnées par Flavius Josèphe, qui les date respectivement du recensement sous Quirinus (6 ap. J.-C. ; cf. Luc 2, 1-2) et du mandat du procurateur Cuspius Fadus (44-46), cf. note a) de la Bible de Jérusalem.- Cerf, 1998).

« C’est-à-dire partisans ou sectateurs de Christus ou (Chrestus). En créant ce sobriquet, les païens d’Antioche ont pris le titre de « Christ » (oint) pour un nom propre. »  Cf. Actes des apôtres 11, 26 : « C’est à Antioche que, pour la première fois, les disciples reçurent le nom de « chrétiens » et note f) de la Bible de Jérusalem.-Cerf, 1998.