Le numéro 86 de Cornerstone, la revue palestinienne de théologie de la libération.

Le dernier numéro de Cornerstone, revue de Sabeel, Centre Œcuménique de Théologie de la Libération en Palestine, paraît dans un sombre contexte. De manière inexorable se poursuivent des massacres de Palestiniens dont la logique de plus en plus claire est l’élimination du peuple arabe de Palestine en tant qu’il forme communauté. C’est le cas en Cisjordanie, d’où les habitants sont chassés de leurs terres, pour que s’accroisse l’espace de la colonisation israélienne, et regroupés de force dans des cités-ghettos. C’est le cas à Gaza, où les bombes et la famine annoncent un exode de masse dont les préludes sont déjà en cours. L’inquiétude gagne même les Arabes israéliens, dont le statut civil ne suffit plus à les protéger. Citoyens de seconde zone dans un État officiellement désigné comme “l’Etat-nation du peuple juif”, ils subissent les menées racistes, anti-musulmanes et anti-chrétiennes d’activistes proches du pouvoir, si rarement poursuivies par l’État israélien.

Cela ne suscite que des remarques anodines de l’administration des États-Unis, dont les livraisons d’armes et de matériel à Israël se poursuivent sans aucun changement. Les autres pays occidentaux, dont l’Europe, alertés par les démarches faites devant la justice internationale pour que soit reconnue la véritable logique des actes d’Israël, ne vont pas non plus au-delà de protestations purement verbales, alors que les échanges commerciaux avec l’Europe sont importants pour l’État d’Israël. Et ce ne sont pas les États arabes proches des Etats-Unis, Egypte, Jordanie, Emirats Arabes Unis et Arabie Saoudite, qui peuvent faire contrepoids à la volonté d’hégémonie israélienne. Alors que les opinions occidentales sont d’abord préoccupées par les échéances électorales, déjà survenues en Europe, puis au Royaume-Uni et en France, à venir bientôt aux États-Unis, les Palestiniens meurent à cette heure dans un isolement à peu près total.

Un éditorial du quotidien Le Monde du 6 juillet 2024 résume cette situation sous le titre : “L’avancée de la colonisation en Cisjordanie doit cesser” (à lire sur le site de MSN, https://www.msn.com/fr-fr/actualite/monde/l-avanc%C3%A9e-de-la-colonisation-en-cisjordanie-doit-cesser/ar-BB1pvL4K). L’éditorialiste donne ces précisions :

“Les accaparements de terrains qui s’accumulent prouvent qu’il ne s’agit pas de propos d’estrade, mais d’un plan mûrement réfléchi. La dernière saisie massive va ainsi permettre de relier quatre colonies installées au cœur du territoire palestinien et d’en faire un bloc. Il s’agit bien de rendre la colonisation israélienne irréversible, l’étape ultérieure étant l’enfermement des Palestiniens de Cisjordanie dans des enclaves sous étroit contrôle israélien.”

Telle est la “solution à deux Etats” que l’administration américaine permet à Israël de mettre en place pas à pas. L’impératif laisse rêveur. Qui, en fait, est en mesure actuellement d’œuvrer pour que cette “exigence”  soit ne serait-ce que perçue ?

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C’est dans ce contexte que les Amis de Sabeel France publient la traduction française du dernier Cornerstone, n°86, revue de Sabeel, Centre Œcuménique de Théologie de la Libération, qui était prévue pour Noël dernier et qui n’avait pas pu être traduite jusqu’à maintenant. On constatera que les diverses contributions qui y figurent n’ont rien perdu ni de leur impact ni de leur actualité.

Télécharger Cornerstone N°86

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Notre partenaire le CCFD-Terre Solidaire est à l’oeuvre sur place avec des organismes de Gaza, Culture et Pensée Libre, qui fournit les campements en abris, nourriture, vêtements, couvertures et médicaments, et Community Development and Media Center et Filastiniyat, qui documentent les violations des droits humains à Gaza, et soutiennent notamment les journalistes particulièrement visés lors des opérations militaires. Il en appelle à une solidarité urgente et imédiate.

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En exergue, ce dernier poème d’un poète de Gaza :

Si je dois mourir
Dernier poème du poète
Refaat Alareer

Si je dois mourir,
tu dois vivre
pour raconter mon histoire
pour vendre mes affaires
et acheter un morceau de tissu
et quelques cordes,
(Fais-le en blanc,
avec une longue traîne)
afin qu’un enfant,
quelque part dans Gaza
quand il regarde le ciel
au fond des yeux
en attendant son père
qui est parti
dans un brasier
– et n’a dit adieu à personne
pas même à sa propre chair
pas même à lui-même –
qu’il voie le cerf-volant,
mon cerf-volant que tu as fait
volant très haut
et qu’il pense un instant
qu’il y a un ange là-haut
qui ramène l’amour.
Si je dois mourir
qu’il apporte de l’espoir
que ce soit une histoire.

JBJ pour Chrétiens de la Méditerranée

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