Egypte :« Les Frères musulmans ne forment pas un bloc homogène »

Egypte-Freres-Muslmans.jpgBrigitte Maréchal, professeur à l’Université catholique de Louvain (Belgique), spécialiste de l’Islam, décrypte l’impact des Frères musulmans en Égypte.

TC : Les Frères musulmans ont-ils un poids politique important en Égypte ?
Brigitte Maréchal * : C’est très difficile à évaluer car la plupart du temps, avant les élections, des arrestations arbitraires ont été faites parmi des personnes qui auraient pu avoir un poids politique important notamment parmi les représentants  syndicaux ou parmi les leaders du mouvement.
Un certain nombre de personnes parmi les frères sont tout de même passées à travers les mailles du filet, notamment en se présentant comme indépendants. On sait par exemple que le parti El Wassat avait été en partie formé par des anciens frères, tout comme le mouvement civil Kefaya (« ça suffit ») qui s’est affirmé dans les années 2004-2005 pour demander un certain nombre de réformes. Kefaya a été partiellement formé par des frères qui se sont écartés de la confrérie mais qui y gardent des liens.
À peine tolérés en Égypte, les Frères musulmans eux-mêmes n’ont jamais pu s’affirmer en tant que parti politique ayant un réel programme politique au-delà des slogans.
Est-ce qu’ils réussiront un jour ou l’autre à s’organiser en véritable force politique ayant un rôle à jouer au sein de l’État ? C’est ce qui est en train de se jouer aujourd’hui. Et pour le moment je n’en suis pas sûre.
On le voit bien dans les événements actuels, même s’ils ont été très présents dans les manifestations et qu’ils ont pris des risques énormes en agissant à tête découverte. Lors de cette révolte, il n’y a pas eu de véritable leadership qui s’est affirmé, y compris au sein de la confrérie.
Les Frères musulmans ont avant tout un poids socioculturel très important. Ils sont  présents dans plusieurs types de syndicats, que ce soit chez les médecins, chez les avocats… Et sont très investis auprès de la population. Ils vont par exemple prodiguer des soins et créer des dispensaires dans l’ensemble du pays. En matière de formation et d’enseignement, ils peuvent aussi tenter de créer des écoles… Ça peut être des initiatives de type privé qui ne sont pas promues sous le nom des Frères musulmans, mais les généreux donateurs de ces initiatives privés sont des Frères musulmans et dans certains milieux ça se sait.” Lire la suite sur le site de Témoignage Chrétien

* Brigitte Maréchal est l’auteur de l’ouvrage “Les Frères Musulmans en Europe, racines et discours” (PUF)