Nous diffusons deux documents sur la situation en Israël-Palestine, transmis à l’initiative de notre partenaire Les Amis de Sabeel France : la dernière déclaration de Kaïros Palestine sur Gaza et une vidéo du Conseil Œcuménique des Eglises (COE) à propos des menaces qui pèsent sur la liberté de culte à Jérusalem (en anglais).
Déclaration de Kairos Palestine
sur l’accord de cessez-le-feu à Gaza
“Mais que le droit jaillisse comme les eaux et la justice comme un torrent intarissable !” (Amos 5.24).
Jérusalem et Bethléem, lundi 20 janvier 2025
Suite au récent accord de cessez-le-feu entre l’occupant israélien et le Hamas, nous adressons nos plus sincères félicitations à notre peuple palestinien pour la fermeté de sa résistance et pour son esprit de résilience en ces temps difficiles et sanglants. Nous pleurons les plus de 47 000 Palestiniens qui ont perdu la vie, et présentons nos plus sincères condoléances à leurs familles ainsi qu’à celles qui ont subi la perte dévastatrice de leur maison et de leurs biens. Aux plus de 115 000 blessés, nous souhaitons un rétablissement rapide et complet. La libération de prisonniers apporte elle aussi un sentiment de soulagement et de joie. Mais en même temps nous disons avec force que tout ceci n’est qu’un premier pas vers une paix et une justice véritables.
Tout en saluant le cessez-le-feu et l’échange de prisonniers, nous espérons que le Premier ministre israélien et son gouvernement d’extrême droite ne saboteront pas cet accord comme ils l’ont fait au cours de ces derniers mois. Il faut qu’une véritable fin de cette guerre génocidaire fasse suite à la libération des prisonniers. Nous exhortons également la communauté internationale à s’engager pour reconstruire Gaza sans conditions, et à ne pas abandonner sa population à sa douleur et à ses souffrances comme cela a malheureusement été le cas après les précédentes guerres d’Israël contre Gaza.
Car la dévastation de Gaza est immense. Environ 70% de tous les bâtiments ont été endommagés ou détruits, dont plus de 250 000 habitations. Plus de 30 hôpitaux ont été détruits, ce qui compromet gravement l’accès aux soins de santé, en particulier pour ceux qui ont été blessés. Selon les Nations Unies, ce sont désormais plus de 50 millions de tonnes de décombres qui recouvrent Gaza. Le seul déblaiement de ces décombres pourrait prendre plus de 14 ans, et la reconstruction durer jusqu’en 2040.
L’obligation de rendre des comptes reste primordiale. Nous en appelons à la communauté internationale pour qu’elle garantisse le respect des normes internationales en matière de droits humains, et pour qu’elle veille à ce que les décisions de la Cour internationale de justice (CIJ) et de la Cour pénale internationale (CPI) soient respectées et mises en application sans délai. Il faut que la longue occupation israélienne et son système d’apartheid prennent fin, et que les droits inaliénables du peuple palestinien ainsi que son droit à l’autodétermination soient reconnus et respectés.
Nous soulignons en outre que ce qui se passe à Gaza ne doit pas se faire aux dépens des Palestiniens de Cisjordanie, y compris ceux de Jérusalem. L’accord de cessez-le-feu à Gaza ne doit pas ouvrir la voie à de nouvelles annexions de terres palestiniennes par Israël en Cisjordanie, ni à une nouvelle vague de meurtres, de mutilations, de destructions et de déplacements de Palestiniens dans ces territoires, avec la bénédiction de certaines superpuissances occidentales qui continuent à soutenir des politiques et des pratiques coloniales à l’encontre de notre peuple. Les souffrances de Gaza ne peuvent pas servir de couverture pour ignorer voire aggraver la situation des Palestiniens dans d’autres parties de la Palestine, y compris dans les territoires de 1948.
Nous demandons également que les journalistes et les missions internationales d’enquête puissent avoir un accès immédiat à Gaza. Il faut que la vérité sur ce qui s’est passé pendant cette période de génocide puisse être révélée au monde entier. Ce n’est que par la transparence et l’obligation de rendre des comptes que nous pourrons garantir que de tels massacres et crimes de guerre ne se reproduiront pas, ni en Palestine ni dans aucune autre région du monde.
Les puissances internationales devraient faire de ce cessez-le-feu une fin définitive de toute guerre, et empêcher ainsi les menaces de l’actuel gouvernement israélien de reprendre la guerre après un mois de cessez-le-feu.
Nous exprimons notre profonde gratitude à toutes les nations, toutes les Églises, organisations, universités et personnes qui se sont montrées solidaires de la Palestine et ont défendu les droits de notre peuple et soutenu notre juste cause et nos demandes de dignité et de justice. Il est essentiel que l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) poursuive son travail vital jusqu’à ce que le droit au retour des réfugiés palestiniens ait été honoré et pleinement mis en oeuvre. Les plans agressifs d’Israël contre l’UNRWA doivent être condamnés et empêchés par tous les pays membres des Nations Unies.
La levée complète de l’embargo illégal sur Gaza est une mesure juste et essentielle pour permettre l’acheminement de l’aide humanitaire à Gaza et le démarrage immédiat des travaux de reconstruction. La reconstruction des écoles, des universités, des hôpitaux et de toutes les infrastructures essentielles doit être une priorité afin de redonner à notre peuple une vie digne et normale.
Enfin, nous appelons nos dirigeants politiques à se montrer à la hauteur de ce moment historique. L’heure est à l’unité nationale et à un leadership collectif et uni pour nous guider vers l’indépendance et la souveraineté. Ce n’est que par un front uni que nous pourrons assurer l’avenir que tous les Palestiniens méritent.
Même si le cessez-le-feu et l’échange de prisonniers marquent un progrès significatif, une paix durable ne pourra être obtenue qu’à travers la justice, la responsabilité et la reconnaissance explicite de nos droits.
Nous l’avions déjà écrit dans notre Document Kairos Palestine de décembre 2009 à la section 4.3 : “Notre avenir et le leur ne font qu’un : ou bien un cercle de violence dans lequel nous périrons ensemble, ou bien une paix dont nous jouirons ensemble”. D’ici que cela se réalise, nous restons déterminés dans notre quête d’un avenir dans lequel notre peuple pourra vivre en liberté, dans la paix, la dignité et l’indépendance dans le pays qui est le sien.
Kairos Palestine
Kairos Palestine est le plus grand mouvement œcuménique et non violent palestinien chrétien, et est basé sur le document Kairos Palestine de décembre 2009 “Un moment de vérité”, qui affirme que les chrétiens palestiniens font partie intégrante de la nation palestinienne et qui est un appel à la paix pour mettre fin à toutes les souffrances en Terre Sainte en œuvrant pour la justice, l’espérance et l’amour. Il a été adopté par la communauté chrétienne, signé par toutes les organisations chrétiennes palestiniennes historiquement reconnues, et approuvé par les dirigeants des Églises de Jérusalem.
Adresse mail : kairos@kairospalestine.ps
Site internet : www.kairospalestine.ps
Traduit par les Amis de Sabeel France
Télécharger ici le texte au format pdf pour diffusion
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Une nouvelle vidéo du COE traite
de la liberté de culte à Jérusalem
Voici la traduction de l’introduction à la vidéo diffusée sur le site du COE le 20 janvier 2025.
Réalisée dans le cadre du Programme d’accompagnement oecuménique du COE en Palestine et en Israël, cette vidéo met en lumière les menaces qui pèsent actuellement sur la liberté de culte et les pratiques discriminatoires, en particulier à l’encontre des populations chrétiennes et musulmanes de Terre Sainte.
“Jérusalem est très importante pour le monde entier, en particulier pour les chrétiens, car c’est le lieu où la divinité et l’humanité se rencontrent. C’est un lieu de rencontre entre le Ciel et la Terre”, déclare Sa Béatitude Theophilos III, patriarche de Jérusalem.
“Nous avons travaillé très dur pour garder et préserver le caractère et le statut politique, culturel, multireligieux et multiethnique particulier de la ville de Jérusalem. Le statu quo de Jérusalem, multireligieux et multiculturel, est menacé, cela ne fait aucun doute. Mais c’est ce que nous allons garder et préserver”, ajoute Theophilos.
Le secrétaire général du COE, le pasteur Jerry Pillay, fait remarquer que Jérusalem est une ville sainte pour les trois religions monothéistes et que le Conseil œcuménique des Eglises s’est engagé à maintenir Jérusalem comme symbole de coexistence et de paix.
“A plusieurs reprises au cours des années, nous avons été témoins d’actes du gouvernement d’Israël qui privent les chrétiens et les musulmans de l’égalité des chances dans l’exercice de leurs droits et de leur liberté de religion à Jérusalem”, a-t-il déclaré. “En tant que Conseil œcuménique des Eglises, nous nous sommes toujours élevés contre les initiatives qui menacent le délicat ensemble historique de relations, de droits et d’obligations qu’englobe le statu quo de Jérusalem.”
Carla Khijoyan, responsable du programme du COE pour l’édification de la paix au Moyen-Orient, a souligné que Jérusalem doit être une ville où la dignité, le patrimoine et les droits de tous ses habitants – chrétiens, musulmans et juifs – sont respectés et protégés de la même manière.
“En ces temps de conflits et de souffrances accrues dans toute la région, les actions qui restreignent les libertés religieuses ne font qu’attiser les tensions et approfondir les divisions”, a-t-elle déclaré. “En tant que Conseil œcuménique des Eglises, nous affirmons qu’une paix véritable et durable ne peut être atteinte que lorsque la justice, l’égalité et l’humanité partagée de toutes les communautés à Jérusalem et dans toute la région sont défendues et sauvegardées.”
Source https://www.oikoumene.org/news/newly-released-wcc-video-addresses-freedom-of-worship-in-jerusalem