Nous relayons les prises de position diffusées par les Amis de Sabeel France, notre partenaire, à propos de la situation à Gaza.
Gaza 2025 : cri d’alarme d’associations chrétiennes en France.
Tribune publiée dans “La Croix”
Edition du 5 juin 2025 : https://www.la-croix.com/a-vif/a-gaza-un-genocide-est-en-cours-le-cri-d-alarme-dassociations-chretiennes-20250605
Sur le blog des Amis de Sabeel France : https://amisdesabeelfrance.blogspot.com/2025/06/gaza-2025-cri-dalarme-dassociations.html
Près de six cents jours après le 7 octobre, et la guerre impitoyable menée dans la foulée par l’État d’Israël, la bande de Gaza s’enfonce dans l’abîme. L’offensive israélienne a déjà fait plus de 52 000 morts et détruit près de 80 % des infrastructures en place. Plus de 2 millions de personnes font face à un “risque critique de famine” selon l’OMS, à la suite du blocus total de l’aide humanitaire imposé par le gouvernement israélien depuis plus de deux mois. Gaza est devenue inhabitable. Les mots manquent pour décrire cette réalité, mais les faits, eux, sont clairs : un génocide est en cours.
La Cisjordanie n’est pas épargnée par la volonté affichée du gouvernement de Netanyahou de rendre impossible l’existence des Palestiniens. Depuis un an et demi, des opérations conjointes entre colons et armée israélienne ont poussé des dizaines de milliers de Palestiniens à fuir, et ont provoqué la mort d’au moins 900 d’entre eux, 7 000 blessés et plus de 40 000 déplacés de force.
L’ONU alerte désormais sur un risque de nettoyage ethnique en Cisjordanie. Les fondations d’une paix juste sont méthodiquement détruites. Dans le prolongement de l’avis de la Cour internationale de justice (CIJ) de juillet 2024, l’Assemblée générale des Nations unies a exigé, par son vote du 18 septembre 2024, la fin de l’occupation israélienne du territoire palestinien et le démantèlement des colonies avant le 18 septembre 2025.
L’histoire jugera notre silence
Face à ce désastre humain et moral, nous, chrétiennes, chrétiens et organisations issues de mouvements chrétiens, porteurs d’un message d’amour, de paix et de justice, ne pouvons rester muets. Tout comme nos dirigeants, qui ont le devoir de tout faire pour que le droit international s’impose, que le droit à l’autodétermination du peuple palestinien soit respecté, et qu’une paix durable soit accordée aux Palestiniens comme aux Israéliens.
Nous accueillons les paroles récentes du président Emmanuel Macron, qui a qualifié la situation à Gaza de “honte” et demandé la reprise “immédiate” de l’aide humanitaire. Mais les mots seuls ne suffisent plus. Le temps est à l’action. Le peuple palestinien vit la plus grande tragédie de son histoire, et le droit international doit être la boussole de ses droits légitimes.
Alors qu’elle coprésidera une conférence internationale pour une solution à deux États en juin prochain, la France doit se montrer à la hauteur de ses responsabilités. Elle ne peut parler d’État palestinien tout en regardant se dissoudre sous ses yeux le peuple censé l’habiter.
Nous lançons donc un appel solennel aux autorités françaises et européennes. Elles doivent exiger un cessez-le-feu immédiat et définitif, la fin du génocide et la libération de tous les otages. Œuvrer au déblocage complet de l’aide humanitaire à Gaza, sans conditions politiques. Exiger la mise en œuvre de la décision de l’Assemblée générale des Nations unies de 18 septembre 2024 sur la fin de l’occupation israélienne. Décider de sanctions, en particulier la suspension de l’accord d’association UE-Israël, tant qu’Israël ne respecte pas le droit international, comme le permet l’article 2 de cet accord.
Parce qu’un jour l’histoire jugera notre silence.
Signataires :
Virginie Amieux, présidente du CCFD-Terre solidaire
Camille Charrière et Foucauld Giuliani, membres du collectif Anastasis
Élisabeth Blanchard, secrétaire générale des Amis de Sabeel France
Marylin Pacouret, présidente de Chrétiens de la Méditerranée
Mathieu Busch, directeur de l’Action chrétienne en Orient
Yves Rolland, Président de l’Acat-France
Jean-Luc Bausson et Karin Flick, coprésidents de Chrétiens dans le monde rural
Karine Cornily et Denis Mazoyer, coprésidents de l’Action catholique ouvrière
Fanélie Carrey-Conte, secrétaire générale de La Cimade,
Benoit Halgand, porte-parole de Lutte & Contemplation
Frédéric-Marie Le Méhauté, ministre provincial des franciscains de France-Belgique
Michel Roy, secrétaire général de Justice et Paix
Caroline Ingrand-Hoffet, pasteure UEPAL à Kolbsheim
Jean-Sébastien Ingrand-Hoffet, pasteur UEPAL pour la justice climatique
Manuele Derolez, présidente de la DCC.
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Voir aussi la tribune publiée dans “La Croix” du 6 juin 2025 :
“À Gaza, le risque de génocide est devenu réalité”
https://www.la-croix.com/a-vif/a-gaza-le-risque-de-genocide-est-devenu-realite-20250606
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Appel des “Voix de Jérusalem pour la justice”, 8 juin 2025
Jérusalem, le 8 juin 2025, jour de Pentecôte.
SOS pour Gaza : Lancez encore vos filets !
À chaque être humain, à toute personne dotée d’une conscience, à tous ceux qui aiment la paix :
C’est comme chrétiens de Terre Sainte que nous tirons la sonnette d’alarme suite à l’escalade sans précédent que vient de connaître la guerre d’Israël contre Gaza. Après plus d’un an et demi de tueries et de destruction, ce que nous vivons aujourd’hui est terrifiant. C’est un appel au secours que nous vous lançons. Nous avons besoin de votre aide.
Le siège de Gaza a repris le 2 mars 2025 avec le blocus le plus long de toute l’histoire de la bande de Gaza sur toute entrée de nourriture et d’autres aides essentielles. Une nouvelle offensive militaire israélienne a été lancée le 18 mars 2025. En cette seule journée, des centaines de personnes ont été tuées. Et depuis lors, ce sont des dizaines de personnes qui sont tuées pratiquement chaque jour. Alors que nous vous envoyons ce message, l’armée israélienne occupe toujours davantage de territoire dans la bande de Gaza, provoquant toujours plus de destructions et de morts.
Au cours des dernières semaines, la situation n’a cessé de se détériorer : en plus des près de 55 000 morts et des plus de 120 000 blessés, c’est la famine qui sévit à Gaza. L’ONU vient de recenser 10 000 nouveaux cas de malnutrition. Les hôpitaux et autres installations civiles sont presque tous fermés. Plus de deux millions d’habitants de Gaza et les 24 otages israéliens encore en vie risquent de mourir à chaque instant.
Et l’escalade en cours n’est pas seulement due au siège et à la nouvelle attaque. Les autorités israéliennes ont dévoilé une nouvelle stratégie, prétendant qu’elle vise à distribuer une aide indispensable. Mais cette distribution est subordonnée à un nouveau déplacement de population. Le contrôle israélien sera assuré par une agence soutenue par les États-Unis : la “Fondation humanitaire pour Gaza” (Gaza Humanitarian Foundation, GHF). La distribution ne se fera que dans les “sites de distribution sécurisés”, entièrement contrôlés par l’armée israélienne. Le 16 mai 2025, le directeur exécutif de la GHF, Jake Woods, a déclaré qu’il refusait de “participer à toute initiative qui délocalise ou déplace de force la population palestinienne”. Mais le 25 mai, il a cédé, après avoir appelé Israël à autoriser l’aide par tous les canaux possibles. La GHF a commencé la distribution de l’aide le 26 mai, mais les procédures de filtrage, les difficultés d’accès aux lieux de distribution et le nombre de Gazaouis tués en s’y rendant font craindre que la GHF ne soit rien d’autre qu’une couverture pour les opérations militaires israéliennes. Et pendant ce temps, les habitants de Gaza continuent de mourir de faim.
Nombreux sont ceux qui s’interrogent sur la signification d’une telle escalade. Tout d’abord, elle place les habitants de Gaza devant un choix terrible : soit se soumettre entièrement au contrôle d’Israël, soit mourir de faim. Et nombreux sont ceux qui se demandent si cela ne va pas déboucher sur une nouvelle tentative de nettoyage ethnique de la bande de Gaza, visant à déplacer la population au-delà de ses frontières. L’objectif final d’éliminer les Palestiniens a été ouvertement formulé à plusieurs reprises par des politiciens israéliens, y compris par des membres du gouvernement, depuis que le président Trump l’a suggéré en premier le 5 février 2025.
Les Nations Unies et de nombreuses ONG internationales ont reconnu que cette “distribution d’aide” est en fait une escalade de la guerre. Elles savent bien que participer à une telle “distribution” reviendrait à se rendre complices de l’utilisation de l’assistance alimentaire comme un élément d’une stratégie de guerre, ce qui est explicitement interdit par les Conventions de Genève.
Les autorités politiques et militaires israéliennes ne cessent de contester les rapports qui décrivent la gravité de la situation à Gaza. Elles contestent le nombre de personnes tuées, agonisantes, blessées et affamées. Mais ces mêmes autorités interdisent aux journalistes étrangers de se rendre à Gaza pour rendre compte de ce qui s’y passe. Et pendant ce temps, depuis le 7 octobre 2023, près de 180 journalistes et professionnels des médias de Gaza ont été tués au cours d’opérations militaires israéliennes.
Alors que les habitants de Gaza sont les premières victimes de cette guerre cruelle, nous autres avons à subir un autre genre de bombardement, moins visible et plus psychologique et spirituel. Submergés par des images et des récits contradictoires, nous nous sentons perdus, paralysés par le désespoir et incapables d’apporter la moindre aide. Nous sommes à bout ! Voilà pourquoi nous vous lançons cet appel. Il faut que la communauté internationale intervienne. Même si nos voix ne semblent pas être entendues par les dirigeants de ce monde, nous encourageons à agir tous ceux qui ont des oreilles pour entendre et des yeux pour voir.
Dans l’évangile selon saint Jean au chapitre 21, v.1-13, les disciples de Jésus s’étaient retrouvés au bord du lac de Galilée. Découragé et épuisé, Pierre leur avait proposé de simplement reprendre leur vie de pêcheurs. Ils avaient travaillé dur toute la nuit, mais n’avaient rien pris. C’est alors que Jésus apparut sur le rivage et leur dit : “Jetez le filet du côté droit de la barque et vous trouverez” (v.6).
Nous aussi nous vous lançons un appel aujourd’hui : s’il vous plaît, essayez encore! Jetez encore vos filets! Nous vous supplions de ne pas abandonner. Laissons-nous remplir par l’énergie de la résurrection et l’Esprit Saint de la Pentecôte, et reprenons la lutte pour la vie et la liberté de nos frères et sœurs de Gaza et de tous les autres lieux de Palestine-Israël!
Parmi les membres de Voix de Jérusalem pour la justice qui lance cet appel, citons :
- Sa Béatitude le Patriarche Latin émérite de Jérusalem Michel Sabbah.
- Son Excellence l’évêque orthodoxe grec Attallah Hanna.
- Sa Grâce l’évêque luthérien émérite de Terre Sainte Munib Younan.
- Yousef Daher.
- Mme Sawsan Bitar.
- Mme Dina Nasser.
- Mme Sandra Khoury.
- M. Sami El-Yousef.
- M. John Munayer.
- M. Samuel Munayer
- M. Rafi Ghattas.
- Rév. Frans Bouwen Mafr.
- Rév. Alessandro Barchi.
- Rév. Firas Abdrabbo.
- Rév. David Neuhaus SJ.
Traduit par les Amis de Sabeel France.