Titre

L’instrumentalisation des religions dans le conflit israélo-palestinien.

Auteur

Colloque organisé au Palais du Luxembourg, le 20 novembre 2010, par le Comité de Vigilance pour une Paix Réelle au Proche-Orient

Type

livre

Editeur

CVPR-PO, 54 rue des Entrepreneurs, 75015 Paris | 2011

Prix

12 €

Date de publication

8 mai 2013

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L’instrumentalisation des religions dans le conflit israélo-palestinien

Petit livre très dense rendant compte des interventions d’une douzaine de diplomates, écrivains, universitaires historiens et juristes, français et palestiniens, lors du colloque du Comité de Vigilance pour une Paix Réelle au Proche-Orient (CVPR-PO) réuni à Paris fin 2010, autour du thème de L’instrumentalisation des religions dans le conflit  israélo-palestinien.

Tous partent du constat que le conflit a pris plus que jamais l’aspect d’un conflit confessionnel. Les intervenants chercheront, chacun à sa manière, à « démonter la mécanique » pour y lire le rôle que l’on fait jouer aux religions.

A l’origine, le conflit était essentiellement colonial, porté par une idéologie sioniste laïque et politique. Il s’agissait de créer un État laïc et moderne sur la terre ancestrale. Deux idéologies laïques se sont opposées : le Mouvement sioniste socialiste et l’Organisation de Libération de la Palestine. Mais l’impasse politique du conflit a entraîné une radicalisation des mouvements religieux et un glissement du politique vers le religieux.

Le radicalisme juif sioniste fonde sur la Bible sa légitimité à revendiquer la possession des territoires palestiniens, la Palestine étant la terre donnée par Dieu au peuple juif. Cette interprétation biblique est utilisée comme une arme pour priver les Palestiniens de leur droit sur leur terre.

L’occupation israélienne des territoires palestiniens a constitué le lit du radicalisme islamiste qui estime que, depuis l’expansion de l’islam à ses débuts, cette terre est la leur. L’islam se trouve donc instrumentalisé par le monde musulman lui-même, à travers des partis politiques comme les Frères Musulmans ou le Hamas, par l’Europe et les États-Unis, et tout autant par Israël.

Autre phénomène d’ampleur : le radicalisme religieux chrétien évangélique aux États-Unis, ou mouvement sioniste chrétien, estimé à environ 70 millions de fidèles, qui est un soutien de poids à la politique d’expansion israélienne.

La conscience d’une responsabilité historique dans les crimes antisémites paralyse la capacité de réaction des Occidentaux face aux injustices dont sont victimes les Palestiniens. Le projet sioniste a bel et bien transféré sur les Palestiniens le mal subi pas les juifs en Occident.

La religion n’est pas directement l’objet de l’affrontement, mais elle est utilisée comme justification de la politique menée et comme marqueur identitaire ou ethnique. Pour l’un des intervenants, nous sommes dans une configuration de guerre tribale dans laquelle la religion devient l’étendard de chaque groupe.

Dans ce paysage, le catholicisme a une position contrastée et ambigüe due à la présence d’une communauté de chrétiens dits « hébraïsants », au poids de l’Histoire et à une attitude peureuse des responsables catholiques. Le manque d’écho aux prises de position de responsables chrétiens palestiniens et la lente disparition du christianisme palestinien de la Terre Sainte, de Jérusalem en particulier, contribuent à renvoyer dos à dos islam et judaïsme dans un rapport conflictuel.

Le judaïsme est fondé sur l’idée que la communauté des croyants constitue un peuple. Cette vision ethnique est donc à la base de l’ambiguïté de l’identité nationale et de l’identité religieuse, telle que construite par le sionisme et l’État d’Israël. Il convient notamment de souligner l’ambigüité du terme « État juif » qui désignait à l’origine une identité ethnico-politique pour les rédacteurs de l’ONU, et qu’Israël revendique aujourd’hui pour réclamer la reconnaissance du caractère « juif » de l’État, ce qui conduirait les Palestiniens à ne pas avoir des droits égaux à ceux des juifs.

Face à une instrumentalisation des religions qui envenime le conflit et qui éloigne de ce fait tout espoir de paix, seul un règlement juste garantissant l’application des droits du peuple palestinien pourrait sauver le processus politique et éviter le piège de l’extrémisme religieux. Les actes du colloque mettent en évidence l’immense responsabilité des Occidentaux, en même temps que la complexité de la situation politico-religieuse. Ils invitent le lecteur à faire preuve de recul et d’esprit critique afin de ne pas tomber dans le piège d’analyses trop rapides et simplificatrices.

Louis Boulanger