Nous tenons à saluer le travail de Michel Remaud dans la lignée du Concile Vatican II, à partir du témoignage de Jean Massonnet, membre de l’AJCF (Amitié judéo-chrétienne de France) à Lyon.
C’est aussi l’occasion pour nous, chrétiens – dits de la Méditerranée – de souligner l’importance des relations interreligieuses avec les Juifs dans l’esprit de Vatican II, alors que nous pouvons être en complet désaccord avec la politique de quasi-apartheid, menée par le précédent gouvernement Netanyahou en Israël par rapport aux Palestiniens, sans d’ailleurs que son successeur présente à première vue d’évolution significative en ce domaine.
Michel Remaud. Une belle plume s’est envolée…
Mais elle a laissé des traces. Michel Remaud nous a quittés, sans bruit, à l’hôpital, un lundi de Pentecôte, ce 24 mai 2021. Mais aussitôt la nouvelle s’est répandue parmi ceux qui, nombreux, ont profité de ses enseignements et ont apprécié ses écrits. Car Michel nous laisse un message qui demeure vivant parmi nous. Les circonstances de son départ donnent à son enseignement un air de Pentecôte et Shavouôth. Comme chrétien, et cela depuis des décennies, il est allé se désaltérer à la source de sa foi chrétienne, et il l’a trouvée auprès du peuple de la Torah, de la Parole vivante qui, depuis le Sinaï, a vocation de retentir pour le monde. Le peuple juif célèbre chaque année le don de cette Parole qui prend corps en lui jour de la fête de Shavouôth, berceau de la fête chrétienne de Pentecôte. Comme si Michel avait choisi son jour pour rejoindre la Jérusalem céleste en fête, après des décennies d’étude passées dans la Jérusalem de ce monde.
Il a communié au retournement de son Église opéré lors du Concile Vatican II. Scrutant sa propre foi chrétienne, il a découvert “le lien qui relie spirituellement le peuple du Nouveau Testament avec la lignée d’Abraham” (Concile, Nostra Aetate, 4). Et il en a tiré les conséquences pour lui-même d’abord, et ensuite pour ses frères chrétiens. Ses enseignements nous ont aidés, nous chrétiens, à porter un regard lucide sur notre passé fait d’incompréhensions et d’infidélités, sur notre dépendance des sources juives, mais surtout, il nous a permis, avec d’autres (dont Jean Dujardin* et Pierre Lenhardt**), de découvrir les richesses auxquelles nous ouvre ce nouveau regard porté sur le peuple juif, et nous en avons profité lors des enseignements qu’il est venu nous donner à Lyon. Il nous reste son souvenir que ses écrits nous aideront à garder vivant.
Certains de nous avaient pu assister à une journée organisée par le CCEJ (Centre Chrétien pour l’Étude du Judaïsme) à propos du midrash. Nos pensées, nos prières vont vers Michel Rémaud.
Jean Massonnet, avec l’AJCF de Lyon
*Prêtre de l’Oratoire, Jean Dujardin a été Secrétaire du Comité épiscopal français pour les relations avec le judaïsme de 1987 à 1999, il est aujourd’hui expert auprès de ce comité.
Il est l’auteur de nombreux écrits consacrés au judaïsme.
**Pierre Lenhardt est décédé en 2019. Religieux de Note-Dame de Sion, il consacré sa vie à la transmission de la tradition d’Israël au sein de l’Église, à travers ses enseignements académiques en Europe et à Jérusalem, et par de nombreux écrits.
Biographie
Michel Remaud est né le 28 septembre 1940 en Vendée. Membre de la Congrégation des Fils de Marie Immaculée (FMI), appelés aussi “Pères de Chavagnes”, il est ordonné prêtre le 16 juillet 1966.
Il a soutenu le 12 janvier 1993 une thèse de doctorat en théologie sur “Le ’mérite des pères’ dans la tradition juive ancienne et dans la liturgie synagogale”, à l’Institut Catholique de Paris.
Après diverses responsabilités en France, notamment professeur au séminaire de Bordeaux, il a vécu en Israël de 1985 à 2016.
Enseignant à l’Institut Pontifical Ratisbonne à Jérusalem de 1985 jusqu’à sa fermeture en 2001, il a créé et dirigé ensuite l’Institut Chrétien d’Études Juives et de Littérature Hébraïque Albert-Decourtray jusqu’en juillet 2016.
De retour en France, il a continué à enseigner la tradition juive en lien avec le Nouveau Testament, dans des universités catholiques (cours et journées d’études comme à Lyon en novembre 2019), à donner des conférences de vulgarisation, en particulier pour l’AJCF au niveau national et local dont il était un grand acteur depuis près de 50 ans.
En 2010, il a reçu le prix de l’Amitié Judéo-Chrétienne de France, à Paris à la synagogue Adath Shalom.
Spécialiste du judaïsme, il s’est particulièrement investi dans la lecture de l’Évangile à la lumière de la tradition rabbinique.
En septembre 2016, il a participé à la remise du Prix AJCF à Jean Massonnet, à Lyon.
Voir l’article que le journal “La Croix” a consacré à sa mémoire le 25 mai 2021.
Principales publications
–Chrétiens devant Israël, Serviteur de Dieu, Cerf, 1983.
–A cause des pères. Le ’mérite des Pères’ dans la tradition juive, Paris et Louvain, Peeters, 1997 (sa thèse).
–Chrétiens et Juifs entre le passé et l’avenir, Lessius, 2000.
–Évangile et tradition rabbinique, Lessius, 2003, puis Nouvelle édition revue et augmentée, Préface d’Anne-Marie Pelletier, Lessius, 2018.
Bibliographie complète :