Gaza. Le communiqué des ONG françaises pour la Palestine, la position des Etats-Unis, un appel de Me Maurice Buttin.

Chaque semaine, la détresse des habitants de Gaza s’accroît, et nous nous efforçons de la faire connaître et comprendre, dans l’espoir de contribuer à un sursaut de la conscience de l’humanité. Nous relayons ainsi :

  • Un communiqué de la plateforme des ONG françaises pour la Palestine, à laquelle CDM appartient
  • Les incertitudes autour de la position des États-Unis au Moyen-Orient
  • Un appel de Maître Maurice Buttin

Communiqué de presse
Pour publication immédiate

A l’attention des membres et observateurs de la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine

Ci-dessous un communiqué de presse sur le plan de “conquête” de la bande de Gaza annoncé par le gouvernement israélien.

Plateforme des ONG françaises pour la Palestine, Association France Palestine Solidarité, CCFD-Terre Solidaire, CEDETIM, Chrétiens de la Méditerranée, la Cimade, CRID, Enfance Réseau Monde – Services, Réseau Euromed France, Ligue des droits de l’Homme, One Justice, les amis de Sabeel France.

Plan de “conquête” de la bande de Gaza : la France doit réagir fermement

12 associations et ONG françaises appellent la France à prendre des engagements concrets contre le plan d’occupation de la bande de Gaza annoncé par le gouvernement israélien.

Lundi 5 mai, Benyamin Nétanyahou a annoncé sur X un plan dit de “conquête” renforçant l’occupation effective de la majorité du territoire de la bande de Gaza. La population palestinienne serait alors contrainte à un nouveau déplacement forcé et dans l’obligation de se masser au sud du corridor de Morag, dans le gouvernorat de Rafah. Nous craignons une nouvelle aggravation de la situation humanitaire déjà catastrophique. Le gouvernement israélien est actuellement en train de mobiliser plusieurs milliers de soldats réservistes en préparation de cette attaque, et a fixé comme date limite de négociation d’un accord de cessez-le-feu à la fin de la visite de Donald Trump dans trois pays de la région, du 13 au 16 mai. Les déplacements forcés de population constituent systématiquement des crimes de guerre.

Nos organisations appellent la France à utiliser l’ensemble des leviers d’action dont elle dispose afin de faire pression sur le gouvernement israélien pour que cesse le génocide en cours, notamment en prenant des sanctions à l’encontre de membres du gouvernement israélien, en interdisant le commerce des produits des colonies israéliennes, en appelant à la suspension de l’accord d’association UE-Israël et en suspendant les livraisons d’armes et de composants militaires à Israël. La France doit aussi clarifier sa position concernant les mandats d’arrêt à l’encontre de Benyamin Nétanyahou et Yoav Gallant, et indiquer qu’elle procéderait à leur arrestation s’ils se rendaient sur le territoire français. Elle doit utiliser tous les moyens dont elle dispose pour que l’aide humanitaire puisse entrer dans la bande de Gaza sans entrave.

Israël refuse que l’aide humanitaire rentre dans la bande de Gaza depuis le 2 mars. 100 % de la population devrait être confrontée à des niveaux élevés d’insécurité alimentaire aiguë, classés en phase 3 (crise) ou plus selon les projections de la classification IPC, et 35 % de la population de Gaza reçoit moins de 15 litres d’eau par personne et par jour pour boire, cuisiner et assurer son hygiène de base [1].

Près de 200 journalistes palestiniens ont été tués dans la bande de Gaza depuis le 7 octobre 2023, ce qui en fait la période la plus meurtrière pour les journalistes depuis 1992 [2]

La Cour internationale de Justice a, dans un avis consultatif du 19 juillet 2024, déclaré que l’occupation par Israël du Territoire palestinien était illégale. L’Assemblée générale des Nations-Unies a adopté le 18 septembre 2024 une résolution qui exige d’Israël de mettre fin à sa présence illicite dans le Territoire palestinien occupé au plus tard en septembre 2025. Le 26 janvier 2024, la Cour internationale de Justice a en outre ordonné à Israël de s’abstenir de commettre des actes constitutifs du crime de génocide.

Contact presse :

Pierre Motin, Plateforme des ONG françaises pour la Palestine, p.motin@plateforme-palestine.org, 07 66 15 39 26

Notes aux rédactions :

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Les incertitudes sur la position des États-Unis

Alors que le Président Donald Trump effectue une visite au Moyen-Orient, on a pu remarquer qu’il ne prévoit pas de visite en Israël, alors qu’il se rend en Arabie Saoudite.

Un article de Julie Connan, dans le quotidien La Croix du 12 mai 2025, met en évidence les intérêts contradictoires qui animent le Président des Etats-Unis au cours de ce premier voyage officiel de son mandat. Il visite l’Arabie saoudite, avant le Qatar et les Émirats arabes unis, en vue de “décrocher des investissements colossaux pour les États-Unis”. Mais le royaume saoudite se dit “révulsé par le plan israélien de ‘conquête’ de Gaza et par les ​’violations continues du droit international’ par Israël.

Le Président Trump voudrait aussi rallier l’Arabie saoudite aux accords dits d’Abraham, de normalisation des relations entre les États arabes et Israël. Un accord était sur le point d’être conclu lorsque la guerre à Gaza a pris une dimension encore inouïe le 7 octobre 2023.

Il est probable que le prince héritier Mohammed Ben Salmane n’ait pas vraiment à cœur les intérêts des Palestiniens en général et des habitants de Gaza en particulier, mais il voit par là une manière d’affirmer la prépondérance du Royaume dans les affaires du Moyen-Orient.

Israël ne cache pas son mécontentement. D’autant que l’imprévisibilité du Président américain pourrait lui faire prendre des positions inattendues, comme imposer un règlement politique pour Gaza.

“Il devrait aussi rencontrer lors de sa tournée trois des ennemis jurés d’Israël : le président palestinien Mahmoud Abbas, le ​Syrien Ahmed Al Charaa et le ​Libanais Joseph Aoun”, conclut Julie Connan.

Voir dans La Croix un dossier sur Gaza paru le 3 mai 2025.

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TOUS COMPLICES OU/ET RESPONSABLES
Maître Maurice Buttin

Le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou a annoncé ces derniers jours une nouvelle campagne militaire sur la bande de Gaza. Il prévoit la « conquête de toute le territoire ». Selon des militaires cela entraînerait le « déplacement de la plupart de ses habitants ». Pour cette opération, des dizaines de milliers de de réservistes sont rappelés sous les drapeaux.

Cette campagne décidée par le Premier ministre est, en fait, le dénouement de la déclaration incendiaire, il a quelques mois, du ministre des Finances, ministre aussi de le Défense, le sinistre Bazalel Smotrich : « Nous ne mettrons fin à cette campagne que lorsque sera démantelé le Hezbolla sévèrement battu, l’Iran privée de son arme nucléaire, Gaza nettoyée du Hamas et que des centaines de Gazaouis auront pu quitter la bande de Gaza pour d’autres pays, que nos otages auront été rendus certains à leurs foyers et d’autres aux tombes d’Israël ».

En agissant ainsi, Benyamin Netanyahou montre une fois de plus sa malhonnêteté en refusant d’appliquer la deuxième phase de l’accord passé avec le Hamas, au risque de la mort des otages encore vivants, dès lors, de facto, tués sur ordre de lui-même !

Un bref exposé rappellera aux lecteurs la présente situation à Gaza après dix-neuf mois d’une guerre génocidaire :

– Plus de 55 000 morts en majorité des femmes et des enfants, sans compter ceux encore sous les décombres (ce qui représente à l’échelle de la France plus que les 1 300 000 morts de la Première Guerre mondiale !)

– Plus de 150 000 blessés.

– 1 200 journalistes palestiniens tués (avec toujours l’interdiction de journalistes observateurs étrangers).

– Les hôpitaux et les écoles hors service.

– La mort de 1 500 membres du personnel de santé, dont des membres de l’ONU.

– Les tentes, où s’étaient réfugiés les Gazaouis brûlés.

– Des blessés assassinés, y compris des enfants.

– 75 % de l’immmobilier détruit

– L’instauration de la famine par le blocage par Israël, depuis deux mois de l’entrée de nourriture ou d’aide humanitaire, touchant délibérément plus de deux millions de Gazaouis, dont près d’un million d’enfants. Le Programme Alimentaire Mondial (PAM) de l’ONU est au bout de ses réserves. Les boulangeries ont fermé les unes après les autres. Les signes de malnutrition apparaissent en particulier sur le corps de milliers d’enfant, identifiés par les agences de santé de l’ONU, comme en état de malnutrition avancée.

Tout cela représente des crimes de guerre, et des crimes contre l’humanité, un génocide comme l’a démontré Amnesty International.

Malgré cette situation mortifère, le Hamas, et les autres combattants palestiniens de Gaza, poursuivent leur résistance inébranlable. Evoquant, à juste raison, « la guerre de la faim », le Hamas a lancé un appel à la communauté internationale à faire pression sur Israël pour faire cesser ses crimes

Quelle a été la réponse à l’appel du Hamas des Israéliens ?

Le 5 mai 2025, le cabinet politico-sécuritaire a approuvé la possibilité d’une « distribution humanitaire si nécessaire à Gaza » (?). Objectif prétendu : « empêcher le Hamas de prendre le contrôle des approvisionnements ». Au surplus, Gaza « ne manque pas de nourriture » (?). Ce projet a été approuvé sans l’aval du sinistre ministre d’extrême droite à la sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, favorable à la destruction des rares stocks de vivre encore disponibles dans l’enclave à Rafah !

« Les ONG présentes à Gaaza ont tiré la sonnette d’alarme. Six semaines d’hostilité intense, combinées à deux mois de blocage complet de l’aide humanitaire, ont privé les civils des moyens indispensables à leur survie », écrit le journal La Croix du 6 mai. Poursuivant il cite le dire de Gavin Kelleher du Norwegian Refugee Council (NRC) revenant d’une mission dans la bande de Gaza : « Israël ne se contente pas d’empêcher de faire entrer de la nourriture, il a aussi orchestré une situation où les Palestiniens ne peuvent plus faire pousser leur propre nourriture. Par ailleurs, le métier de pêcheur est devenu l’un des plus dangereux au monde »

Quelle a été la réponse à l’appel du Hamas de la communauté internationale ?

Selon une déclaration du porte-parole de l’Union européenne Anouar El Aouni, lors du point de presse quotidien de la Commission européenne, celle-ci est « préoccupée par l’extension prévue de l’opération des forces israéliennes à Gaza qui entraînera de nouvelles victimes et souffrances pour la population palestinienne. L’U.E. exhorte Israël à faire preuve de la plus grande retenue ». « Préoccupée…exhorte », des mots toujours des mots – alors que la présidente de l’U.E, ne cesse de réclamer de nouvelles sanctions contre la Russie dans la guerre en Ukraine !

Le Président de la République, Emmanuel Macron, a déclaré au sujet de Gaza : « La situation la plus critique que l’on ait jamais connue ». Des mots, toujours des mots.

De son côté le ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot, le 6 mai, avait déjà assuré devant l’Assemblée nationale que« Gaza est au bord de l’effondrement, du chaos et de la famine (…) L’attitude d’Israël n’est pas acceptable. L’armée israélienne a aussi la responsabilité de l’approvisionnement en nourriture et autres produits de première nécessité ». Il a condamné de façon très ferme le plan dévoilé le 5 mai par Israël. Ajoutant : « L’urgence, c’est le cessez-le-feu, l’accès sans entrave de l’aide humanitaire massif et la libération des otages du Hamas ». « Condamné de façon très ferme ». Des mots, toujours des mots.

Quelques mois auparavant les ministres des Affaires étrangères arabes, réunis au Caire, avaient réclamé la levée du siège imposé par Israël à Gaza, réclamant l’acheminement « immédiat de l’entrée de l’aide humanitaire, de nourriture et de carburant pour aider les 2,3 millions de Palestinien soumis à des raids aériens d’Israël en réponse à l’attaque du Hamas ». « Réclamé la levée du siège ». Des mots, toujours des mots.

De son côté la Chine ne fait guère mieux. Suivant de près la situation entre la Palestine et Israël, le porte-parole du ministère des affaires étrangères a déclaré le 6 mai : « La Chine s’oppose à la poursuite des opérations militaires à Gaza ». « S’oppose ». Là encore des mots, toujours des mots.

Pour en revenir aux déclarations de B. Smotrich et de son compère I. Ben Gvir, qu’attend le Président de l’Autorité palestinienne, le chef de l’État de Palestine, Mahmoud Abbas, pour demander qu’une enquête soit engagée par le Tribunal Pénal International à leur encontre pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité et poursuivis par la suite devant le dit TPI, comme le sont, depuis le 21 novembre 2024, Benyamin Netanyahou et l’ancien ministre de la Défense Yoav Gallant.

A ces deux personnages pourrait s’ajouter une enquête, diligentée, toujours pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, sur le cas de la Présidente de l’Union Européenne, Ursula von der Leyen, comme l’a demandé la rapporteure spéciale des Nations, Francesca Albanese…

Paris le 9 mai 2025

Me Maurice Buttin est président par intérim du CVPR-PO (Comité de Vigilance pour une Paix Réelle au Proche-Orient), membre des C.A. de “Pour Jérusalem” et des “Amis de Sabeel-France”, membre de “Chrétiens de la Méditerranée” et de l’AFPS (Association France Palestine Solidarité) Paris 14°.

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