Voix religieuses sur la détresse de la Palestine et des Palestiniens.

C’est le deuxième anniversaire de la guerre de Gaza marqué aussi par le redoublement des meurtres de Palestiniens dans les territoires occupés de Cisjordanie : une “Voix de Jérusalem pour la Justice”, témoignage œcuménique émanant d’Eglises en Terre sainte ; l’appel de prêtres  catholiques contre le génocide ; une lettre du rabbin Gabriel Hagaï au premier ministre israélien Benyamin Netanyahou. Cette lettre mérite d’être prise en considération alors même que son destinataire l’a traitée par le mépris, en arraisonnant en haute mer les navires de la flottille humanitaire pour Gaza.

Une Voix de Jérusalem pour la Justice
Un témoignage œcuménique pour l’égalité et une paix juste en Palestine/Israël

27 septembre 2025

C’est l’occupation, et non l’Autorité Palestinienne, qui nuit aux chrétiens en Palestine

Le 26 septembre 2025, le Premier ministre israélien Binyamin Netanyahou a pris la parole devant l’Assemblée générale des Nations Unies à New York. Netanyahou a défendu la guerre-génocide d’Israël à Gaza ainsi que la politique de son gouvernement extrémiste. Le Premier ministre israélien a prononcé de nombreuses demi-vérités et des mensonges flagrants, il a repris à son compte
l’islamophobie et volontairement confondu l’antisémitisme avec la critique légitime du sionisme et d’Israël. Ici, nous souhaitons répondre à un mensonge particulier qui concerne les chrétiens de Palestine.

Netanyahou a déclaré : “Les chrétiens ne sont pas mieux lotis. Quand Bethléem, le lieu de naissance de Jésus, était sous contrôle israélien, 80 % de ses habitants étaient chrétiens. Mais depuis que l’Autorité palestinienne (AP) en a pris le contrôle, ce nombre est tombé à moins de 20 %.”

M. Netanyahou n’a pas le droit de parler au nom des Palestiniens chrétiens et ne peut être autorisé à déformer la vérité. Bethléem était une ville à majorité chrétienne jusqu’en 1948 : plus de 80 % de la population était chrétienne. Avec l’expulsion d’environ 750 000 réfugiés palestiniens de leur patrie en Palestine historique lors de la Nakba de 1948, trois camps de réfugiés furent établis à Bethléem, modifiant la composition démographique de la ville. Lorsque Israël a occupé la Cisjordanie en 1967, Bethléem avait déjà une population majoritairement musulmane. Des décennies d’occupation israélienne, créant des conditions de vie extrêmement difficiles, ont poussé de nombreux chrétiens et
musulmans à émigrer, et cette réalité perdure encore aujourd’hui. Bethléem, une ville dépendante du tourisme, a particulièrement souffert au cours des deux dernières années de la guerre israélienne contre Gaza, avec l’arrêt quasi total du tourisme et des pèlerinages. Des centaines de personnes ont quitté Bethléem ces derniers mois à cause des ravages continus de l’occupation israélienne et de la violence militaire.

La raison pour laquelle les chrétiens – ainsi que beaucoup d’autres – quittent Bethléem est l’occupation israélienne et ses politiques de fermetures, de permis, de droits de résidence exclusifs, etc., et non les politiques de l’Autorité Palestinienne.

Nous insistons : chrétiens et musulmans à Bethléem et dans toute la Palestine continuent de vivre ensemble comme un seul peuple, partageant la même lutte sous l’occupation. La vérité demeure : les Palestiniens, chrétiens comme musulmans, recherchent l’égalité, la justice et la paix dans leur patrie.

Signataires :

S.B. Michel Sabbah, Patriarche latin de Jérusalem (émérite)
S.E. l’Archevêque de Sébastié, Attallah Hanna, grec orthodoxe,
S.E. Munib Younan, Évêque de l’Eglise Evangélique Luthérienne en Jordanie et Terre Sainte (émérite)
M. Yusef Daher, Mme Sawsan Bitar
M. Sami El-Yousef, M. John Munayer
M. Samuel Munayer, Mme Sandra Khoury
M. Rafi Ghattas, Mme Dina Nasser
P. David Neuhaus SJ, P. Firas Abdrabbo
P. Frans Bouwen Mafr, P. Alessandro Barchi et d’autres membres

Télécharger ici le texte du témoignage

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Lancement du réseau “Prêtres contre le génocide”

Des prêtres et évêques italiens s’unissent pour réclamer justice, paix et vérité concernant la situation tragique qui touche les territoires occupés de Palestine.Une veillée de prière et un témoignage public sont prévus à Rome le 22 septembre 2025, à la veille de l’Assemblée générale des Nations unies.

4 septembre 2025 : un groupe de plus de 200 prêtres d’Italie et d’autres parties du monde, bouleversés par les massacres en cours à Gaza et l’escalade de la violence dans les zones environnantes, annoncent la création du réseau “Prêtres Contre le Génocide”, une initiative populaire visant à rassembler des voix, des expériences et des engagements pastoraux pour promouvoir la paix et la protection de toute vie, avec un accent particulier sur la Terre Sainte. “Face à l’horreur du génocide qui touche Gaza et le peuple palestinien, en tant que pasteurs, nous ne pouvons rester silencieux”, déclarent les organisateurs, faisant écho aux paroles du pape François : “La guerre est toujours une défaite, toujours.”

Objectifs du réseau

• Paix et réconciliation : prier et promouvoir une paix “désarmée et désarmante”,
comme l’a déclaré le pape Léon XIV, en proclamant l’Évangile de la réconciliation et de l’amour, même pour les ennemis.

• Protection des victimes et légalité internationale : donner la parole aux sans-voix, dénoncer les crimes de guerre, le nettoyage ethnique et toutes les formes de génocide en Palestine et ailleurs ; exiger le respect du droit international, des résolutions de l’ONU et des décisions de la Cour pénale internationale.

• Présence chrétienne en Terre Sainte : soutenir les communautés chrétiennes en Palestine et maintenir une Église vivante, où chacun se sent chez soi.

• Vérité et responsabilité : promouvoir une culture de réconciliation fondée sur la justice, en soutenant les enquêtes indépendantes sur les événements du 7 octobre 2023 et tous les crimes commis sous l’occupation israélienne, avant et après cette date.

Actions prévues

• Déclaration publique signée par des prêtres et des évêques de toute l’Italie et d’autres pays.
• Rassemblement national à Rome pour la prière et le témoignage public.
• Initiatives locales : catéchèse, veillées de prière et événements de sensibilisation dans les paroisses.
• Collaborations œcuméniques et interreligieuses avec des organisations engagées en faveur de la paix et de la justice.

“Nous demandons au Seigneur de donner à nos représentants politiques le courage de ne pas faire de compromis, la force de défendre chaque vie humaine et la sagesse de construire une paix fondée sur la justice et la vérité. Que toutes les guerres cessent, car comme l’a dit Saint Jean-Paul II : La guerre est toujours une défaite pour l’humanité.”

Réseau “Prêtres contre le génocide”
Le Christ est mort à Gaza
Traduction deepL

Pour lire et signer le document complet, déjà signé par 500 prêtres de vingt pays, y compris six évêques et un cardinal, cliquer sur le lien : Firma il documento della rete “Preti contro il Genocidio

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Lettre ouverte du rabbin Gabriel Hagaï à Benyamin Netanyahou

Rédigée la veille de Rôsh ha-Shânâ,
pour demander le passage de la flottille humanitaire vers Gaza.

Paris, le 22 septembre 2025

À l’attention du Premier Ministre israélien M. Benyamin Netanyahou

Monsieur le Premier Ministre, en cette veille de Rôsh hash-Shânâ, notre nouvelle année juive 5786, jour où “tous les résidents du monde (kol bâ’ê çôlâm) défilent devant Lui semblablement aux habitants des Cieux (kivnê Mârôn)” (Mishnâ Rôsh hash-Shânâ 1:2), je vous adresse cette lettre ouverte qui constitue un plaidoyer pour laisser passer la flottille humanitaire pour Gaza (Global Sumud Flotilla).

Selon notre tradition religieuse, l’urgence du pige!) nèfesh (c’est-à-dire de la personne mourante qu’on peut sauver) repousse même les interdits shabbatiques (cf. T. Yômâ 85a ; Mishné Thôrâ, Hilkh. Shabbâth II, 3) — indépendamment du fait qu’il s’agisse d’un mourant juif ou non-juif. Et cette urgence vitale est actuellement présente à Gaza pour des milliers de personnes.

Monsieur le Premier Ministre, tous les êtres humains ont été créés à l’image de Dieu (be5almô), selon Sa ressemblance (kidhmûthô) (cf. Genèse 1:26) ; aucune vie n’est inférieure ou supérieure à l’autre ; nous sommes tous égaux, quels que soient notre sexe, notre race, notre culture et notre religion. Nos Sages enseignent (Sanhédhrîn IV:5) : “Adam a été créé unique, pour enseigner que celui qui fait périr une personne, c’est comme s’il avait fait périr tout un monde, et que celui qui fait vivre une personne, c’est comme s’il avait fait vivre tout un monde ; et pour la paix des créatures, qu’un homme ne dise pas à son prochain : ‘Mon père est plus grand que le tien (abbâ gadhôl mé-avîkhâ)'”.

Selon notre Torah chacun est responsable de ses crimes (Deut. XXIV:16) : “On ne fera point mourir les pères pour les fils, et l’on ne fera point mourir les fils pour les pères ; on fera mourir chacun pour son péché.” Principe répété dans ce verset (Ézéchiel XVIII:2o) : “L’âme qui pèche, c’est celle qui mourra. Le fils ne portera pas l’iniquité de son père, et le père ne portera pas l’iniquité de son fils. La justice du juste sera sur lui, et la méchanceté du méchant sera sur lui.” Ainsi (Genèse IX:6) : “Qui aura versé le sang de l’Homme, par l’Homme son sang sera versé (shôfékh dam-hâ-Âdhâm, bâ-Âdhâm dâmô yishshâfékh).” Il est donc impensable de punir, au nom de notre judaïsme, des innocents pour des meurtres qu’ils n’ont pas commis. Rien ne vaut plus que l’action juste et non-violente. Nous sommes tous liés, tous unis par nos liens d’humanité. Lorsqu’un seul être humain est tué, c’est nous tous qui mourrons.

Monsieur le Premier Ministre, l’État d’Israël — que vous dirigez — se targue d’être un pays juif ; il faudrait donc qu’il commence à agir comme ce qu’il prétend être ! Notre Torah est basée sur la justice, l’amour, l’humilité et l’inclusion — vertus incarnées par nos Prophètes et nos Saints, tels Moïse, Aaron et Hillel l’Ancien (paix sur eux — çalêhèm hash-shâlôm). Tout le contraire des “valeurs” du sionisme politique. Débarrassez-nous de cette idéologie toxique —construite sur l’orgueil, l’oppression, la haine et l’exclusion —, de facto raciste, exclusiviste, hégémoniste et faiseuse d’apartheid et de génocide.

Selon notre Torah, on ne saurait établir une société saine sur l’injustice envers ne fût-ce qu’une seule personne (fût-elle non-juive) — a fortiori envers un peuple tout entier (i.e. les Palestiniens). Il est dit (Deut. XVI:2o) : “Sedheq sedheq tirdof (justice, tu poursuivras la justice) !” Et (Deut. XXX:15-19) : « Wuvâhartâ ba-hayyîm (tu choisiras la vie).” De même, la Torah doit être “[notre] sagesse (hokhmathkhèm) et [notre] intelligence (wuvînathkhèm) aux yeux des nations” (Deut. IV:6), plutôt qu’un manuel d’oppression nationaliste.

Monsieur le Premier Ministre, il n’y a rien au monde meilleur que la paix — et une paix authentique en Terre Sainte n’existera que fondée sur la justice pour tous les protagonistes, et non sur la simple absence de violence ou sur le remplacement d’une injustice par une autre. La paix ne se fera pas au détriment des Palestiniens et au bénéfice des Israéliens, ou réciproquement, mais au bénéfice des deux, ensemble.

Surtout que la Rédemption finale tant annoncée par nos Prophètes ne se fera que basée sur l’Amour inconditionnel (Ahavath-hinnâm), et pas sur autre chose. Comme l’écrit explicitement rabbî Yehèzqél Taub de Kuzmir (1771-1856) : “De la même manière que la Destruction du Temple a eu lieu à cause de la haine gratuite (sin’ath hinnâm — cf. T. Yômâ 9b), de même, pour le réparer, il faut de l’Amour gratuit, que chacun aime son prochain gratuitement, inconditionnellement.” (Nèhmâdh miz-Zâhâv, p. 77). Seul l’établissement d’une société humaine globale fondée sur la justice, la bonté et la compassion hâtera la Rédemption messianique tant espérée.

Monsieur le Premier Ministre, j’en appelle donc à nos principes juifs d’humanisme, de charité, de justice et d’entraide, afin que vous donniez l’ordre de laisser passer la flottille humanitaire pour Gaza (Global Sumud Flotilla). Les Gazaouis ont tant besoin de cette aide d’eau potable, de nourriture et de médicaments qu’elle apporte, ainsi que de ses nombreux médecins et professionnels de santé embarqués. Le monde entier a les yeux rivés sur votre décision.

N’oublions pas que Dieu est notre origine et celle de nos épreuves ici-bas, ainsi que notre finalité (Isaïe XLV:22) : “Tournez-vous vers Moi, et vous serez sauvés, vous tous qui êtes aux extrémités de la terre.” Que s’accomplisse en nous ici-bas le verset (Psaumes CXXXIII:1) : “Qu’il est bon et qu’il est agréable le séjour des frères ensemble (hinné mot-tôv wuman­nelm shèveth ahîm gam yâhadh).”

Le-shônâ tôvâ nikkâthév we-néhâthém (que Dieu décrète sur nous une bonne année). Veuillez agréer, Monsieur le Premier Ministre, l’assurance de mon attention respectueuse. kGabriel Hagaï, F(ab in

Gabriel Hagaï est un rabbin orthodoxe séfarade franco-israélien, conférencier, linguiste, philologue, paléographe-codicologue, herboriste, médiateur, poète, calligraphe et chanteur. Formé à Jérusalem et à Boston, il est enseignant-chercheur et chargé de cours dans diverses universités et instituts supérieurs parisiens. Très investi dans le dialogue interreligieux, il est membre actif et conseiller de plusieurs associations françaises et internationales promouvant la paix. Père et grand-père, il est également maître-initiateur dans une tradition mystique non-dualiste du judaïsme remontant jusqu’à Moïse.

Ce texte est diffusé par l’Union Juive Française pour la Paix (UJFP). On peut en télécharger ici le texte original et le retrouver en ligne :

https://ujfp.org/lettre-ouverte-de-gabriel-hagai-a-netanyahou-pour-demander-le-passage-de-la-flottille-vers-gaza/

Image accompagnant le texte du rabbin Hagaï.

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