Le commerce équitable au Liban : Le terreau du dialogue interculturel et de l’unitÉ sociale.
Philippe Adaime, 40 ans, libanais maronite, est consultant en management et finance et professeur à l’université libanaise en finance et en audit. Cependant, il est surtout connu pour être le fondateur et le trésorier de l’association Fair Trade Lebanon, association qui développe le commerce équitable libanais dans le domaine alimentaire.Après avoir étudié le droit, la finance et comptabilité en faculté et en école de commerce en France, il porte un intérêt pour le commerce et particulièrement le commerce équitable. Il revient au Liban, et devient consultant et professeur de finance et d’audit à l’université libanaise.
Lors d’un séjour associatif au sud du Liban, Philippe a été frappé par cette région abandonnée où régnait une désespérance terrible. Pour pallier ce problème, « il faut que les gens produisent quelque chose pour y vivre ».
Commerce équitable : une lutte contre la pauvreté
Philippe part du principe que le problème pourrait être résolu par un travail de développement économique durable qui reposerait sur des partenariats. Sa passion pour le terroir et la découverte l’a amené à se diriger vers l’option du commerce équitable dans le secteur alimentaire. Il découvre, lors de ses excursions et ses rencontres, toute une panoplie de produits locaux inconnus du grand public susceptibles d’être vendus : huiles, épices, confitures, tisanes, sirops, etc.
«Partir de rien » tel était le défi. Pour cela « il fallait en faire des produits vendables tout en les aidant sur le plan marketing et gestionnaire ». L’association voit ainsi le jour en 2006 à l’occasion d’une première commande réalisée avec un importateur français de commerce équitable, Artisanat Sel. Leur objectif premier était de développer le monde rural libanais en vendant leurs produits alimentaires locaux dans le monde par le biais du commerce équitable. La première étape du travail a été la rencontre avec les producteurs locaux. Un premier contact décisif mais laborieux. « Lorsque nous arrivons dans les villages dévastés, tout d’abord les gens se méfient» explique Philippe, « l’acte d’achat permet d’instaurer une confiance ». Philippe et son équipe demandent alors à leurs nouveaux partenaires ce qu’ils savent faire, prennent des échantillons des produits pour ensuite démarcher les clients.
Coopératif et commerce équitable : tissu du lien social par la formation et la sensibilisation.
« Fair Trade Lebanon » permet de faire travailler ensemble les différents villageois. Des villageois issus de toutes confessions. Elle les encourage à une meilleure qualité et à une réflexion sur leurs propres coûts. C’est aussi à travers cette ONG que des formations en comptabilité sont proposées aux villageoises, qui n’ont aucune base en gestion. Pour Philippe, « il est important que les coopératives deviennent autonomes ». L’équipe associative sensibilise aussi l’opinion internationale dans les salons professionnels comme celui de Montréal, Lille ou de Beyrouth. Dans ce dernier, qui réunit un public aisé, l’association joue sur la fibre patriotique et sur l’acte de solidarité nationale : « acheter une huile d’olive qui aide ». Dans les universités, la sensibilisation commence par une approche économique. L’équipe de « Fair Trade Lebanon », incite surtout les étudiants à aller découvrir les coopératives sur place. Une initiative qui a permis à des jeunes de se rallier au mouvement.
Le projet connaît un grand succès. Débuté avec 75.000$ et deux produits, l’huile et la tisane produites par une coopérative, l’association fédère aujourd’hui 14 coopératives à travers le pays. Ces coopérative proposent une gamme de 54 produits alimentaires et emploient 340 personnes toutes confessions confondues. Désormais, l’association dispose d’un budget de 300.000$ et vend les produits aussi bien au Canada, en France, en Belgique, en Luxembourg qu’en Allemagne.
Aujourd’hui, Philippe éprouve beaucoup de fierté et voit dans cette expérience une réussite sur le plan professionnel, « ma plus grande récompense personnelle est d’acheter le produit que j’ai vendu et d’aider ainsi à la lutte contre l’exode rural et l’émigration des libanais ». Plein d’optimisme et d’ambition, Philippe espère que dans 10 ans l’association sera une multinationale. La persévérance, la créativité, l’espérance, la foi et la création d’opportunités dans les zones défavorisées : tel est le message désormais de Philippe aux jeunes français.