Proche-Orient, le pari du face-à-face

La terre et la raison

Le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, et le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, reprennent aujourd’hui les négociations, suspendues après l’opération israélienne dans la bande de Gaza. Le président Barack Obama, qui doit recevoir séparément les acteurs du processus de paix avant de les réunir pour un dîner, veut peser sur l’avenir de la région.

La tâche s’avère difficile. La presse israélienne a accueilli avec scepticisme l’annonce de ces nouvelles négociations, rappelant les échecs passés et les désaccords de fond. L’attentat de mardi, le plus grave depuis de nombreux mois, revendiqué par la branche armée du Hamas, causant la mort de quatre colons israéliens, vient aussi rappeler que parmi les protagonistes, certains ne sont pas prêts à faire la moindre concession, parce qu’ils considèrent leurs vis-à-vis comme des ennemis et non comme des interlocuteurs possibles, et tout compromis éventuel comme une défaite.

Barack Obama saura-t-il mener à bien un dossier sur lequel ses prédécesseurs ont connu bien des déconvenues ? Les rencontres d’Oslo et de Washington en 1993, de Camp David en 2000 et de Taba en 2001, puis d’Annapolis en novembre 2007 n’ont pas abouti. Sa diplomatie a pourtant déjà marqué un premier point en permettant la reprise de « négociations directes », « sans conditions préalables » , c’est-à-dire sans l’exigence de l’arrêt de la colonisation du côté palestinien. Et en plaçant cette nouvelle phase de négociations sous son égide, en l’inaugurant chez lui, à la Maison-Blanche, il soustrait les protagonistes aux influences immédiates de tous ceux qui, sur place, sont opposés à la recherche d’un éventuel compromis.

Tout reste cependant à faire, car la terre est souvent affaire de cœur alors que la paix est affaire de raison. Elle a besoin de négociateurs désireux d’aboutir à un compromis sur la manière de partager et d’habiter une terre si chère au cœur de tous. Et parce que la paix ne se construit pas en un jour, elle suppose aussi un investissement diplomatique durable, capable de soutenir les protagonistes dans les phases cruciales des discussions, quand planent les menaces de rupture. Article écrit par Dominique Greiner dans le journal La Croix du 2 septembre 2010.

Lire sur le site du journal La Croix les articles suivants:

Négociations directes entre Israéliens et Palestiniens

La paix au Proche-Orient, une priorité pour Barack Obama

Les figures de la négociation

REPÈRES: une succession d’échecs

1991, Madrid. Pour la première fois, Israéliens et Palestiniens sont réunis à l’occasion d’une conférence de paix israélo-arabe. Ces premières négociations directes n’aboutissent pas.
1993, accords d’Oslo. Israël et l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) se reconnaissent mutuellement et signent une déclaration de principe sur une autonomie palestinienne transitoire de cinq ans. Le processus de mise en place d’un État palestinien est lancé. Les obstacles se multiplient cependant jusqu’au blocage du processus d’Oslo. Le Hamas refuse l’existence d’un État israélien. Yitzhak Rabin, le premier ministre israélien, contesté dans son propre camp, est obligé d’organiser le bouclage des territoires palestiniens. La détérioration des conditions de vie qui s’ensuit dans les territoires engendre de nouveaux attentats.
1998, Wye Plantation. Accord intérimaire qui transfère à la partie palestinienne 13 % des territoires occupés.
2000, Camp David II. Le leader palestinien Yasser Arafat refuse les propositions israéliennes, qui n’abordent pas la question de Jérusalem ni celle des réfugiés palestiniens. La visite de l’esplanade des Mosquées par Ariel Sharon et d’autres membres du Likoud pour démontrer le contrôle israélien sur ce lieu saint après l’échec des négociations conduit au soulèvement de la seconde Intifada.
2001, Taba. Les discussions n’aboutissent pas.
2003, Aqaba. Ariel Sharon et Mahmoud Abbas ratifient la feuille de route élaborée par le Quartette sur le Proche-Orient, qui prévoit la création d’un État palestinien avant 2005 après la fin des violences palestiniennes et un gel de la colonisation israélienne.
2003, Genève. Des personnalités israéliennes et palestiniennes présentent et signent un plan de paix alternatif.
2007, Annapolis. Israël et l’Autorité palestinienne conviennent de tendre à un accord de paix avant fin 2008. L’opération israélienne dans la bande de Gaza annule ces efforts.