Courrier International – Pour l’Europe, que vaut la mort d'un enfant migrant ?

“Si les images, incroyablement bouleversantes, du corps d’un enfant syrien échoué sur une plage ne conduisent pas l’Europe à changer d’attitude par rapport aux réfugiés, qu’est-ce qui pourra le faire ?” interpelle le quotidien britannique The Independent.
Le 2 septembre, des migrants qui tentaient de rejoindre Cos, en Grèce, ont vu leur embarcation chavirer. Un naufrage qui a coûté la vie à 12 réfugiés syriens. Sur la plage de Bodrum, en Turquie, un garçon de 3 ans a été retrouvé mort. Selon le quotidien turc Hurriyet, ces naufragés venaient vraisemblablement de Kobané, ville de Syrie adossée à la frontière turque et théâtre de violents combats entre djihadistes de l’Etat islamique et miliciens kurdes.
The Independent poursuit en expliquant sa décision de publier ces photos insoutenables pour que “la réalité du désespoir qui est le lot de nombreux réfugiés ne soit pas noyée par le flot de paroles sur ‘la crise des migrants’”.
Même ton dans le quotidien suisse Le Temps, qui titre : “Pourquoi il faut montrer l’enfant de Bodrum”. Et d’enchaîner : “Il y a des photos qui témoignent de l’urgence de manière encore plus forte que de longs textes. Le jeune garçon retrouvé mort sur une plage turque mérite notre respect et notre considération, pas que l’on détourne les yeux.”
“L’image qui ébranle toute l’Europe”, titre de son côté le quotidien espagnol El País en évoquant le destin tragique d’“Aylan, ce petit garçon syrien qui voulait fuir les islamistes”. “Le désespoir qui conduit à prendre la mer pour fuir la guerre se reflète dans cette photo”, ajoute le journal. Il précise que le drame d’Aylan et de son frère de 5 ans, tous deux morts en essayant de fuir une zone de guerre, fait écho à la situation de milliers d’enfants.

 
“Deux millions de mineurs syriens vivent comme réfugiés dans d’autres pays, selon l’Unicef. Même si la majorité de ces réfugiés vivent dans les pays voisins de la Syrie, de plus en plus de familles décident de tenter d’atteindre l’Europe. Un tiers des migrants qui débarquent en Grèce, notamment les Syriens, sont des femmes et des enfants”, insiste le quotidien espagnol.
Pour sa part, le quotidien belge Le Soir s’indigne : “Immigration : le silence est un poison”. Et lance un appel : “La classe politique, solutions populistes mises à part, semble paralysée face à la crise migratoire. Face à son ampleur, il est temps que chacun prenne ses responsabilités.”
“Que ne comprenez vous pas ?”, titre de son côté le quotidien grec Efimerida ton syntakton. Bardant sa une avec ce jeune réfugié syrien de 3ans, dont le corps a été repêché sur la plage de Bodrum, le quotidien de gauche interpelle l’Union européenne en ajoutant en sous-titre :“Sur les plages et les terres, ce sont les valeurs de la culture européennes qui sont au défi” et aussi un vers du poète Kostas Varnali : “Où dois-je te cacher mon fils pour que les méchants ne t’atteignent pas ?”. Dans ses pages, le quotidien critique âprement le manque de politique européenne migratoire, alors que la politique économique est si bien organisée.