AFP – Pape François : Que personne ne pense pouvoir faire de Dieu un bouclier

Le pape François a fustigé hier en Albanie l’utilisation de Dieu comme « bouclier » par les mouvements fondamentalistes religieux, dans un contexte de violence jihadiste au Moyen-Orient et en Afrique, et a affirmé qu’on ne peut tuer ou discriminer au nom de la foi.
« Que personne ne pense pouvoir faire de Dieu un bouclier lorsqu’il projette et accomplit des actes de violence et de mépris ! Que personne ne prenne prétexte de la religion pour accomplir ses propres actions contraires à la dignité de l’homme et à ses droits fondamentaux ! » a lancé le pape devant les dirigeants albanais. En effet, a-t-il noté, le sens religieux authentique est « trahi par des groupes extrémiste » qui « déforment et instrumentalisent les différences entre les diverses confessions », et en font « un facteur périlleux d’affrontement et de violence ».
Toutes les religions étaient concernées par cet avertissement, mais nul doute que le pape pensait aux exactions des jihadistes de l’État islamique (EI) en Syrie et en Irak, et à celles de Boko Haram au Nigeria. Selon lui, une « guerre mondiale, par morceaux », est en cours dans le monde en raison des livraisons d’armes alimentant les groupes violents.

Devant les dignitaires orthodoxes, musulman, bektaschi (courant du soufisme) et protestant, à l’Université catholique du « Bon Conseil », François, citant Jean-Paul II à Tirana en 1993, a renchéri : « La vraie liberté religieuse a horreur des tentations de l’intolérance et du sectarisme. » « La religion authentique est source de paix et non de violence ! Personne ne peut utiliser le nom de Dieu pour commettre de la violence ! Tuer au nom de Dieu est un grand sacrilège ! Discriminer au nom de Dieu est inhumain ! » a-t-il martelé.

De plus, le pape a souligné l’interdépendance entre communautés : « Nous ne vivons pas comme des entités autonomes et autosuffisantes, comme des groupes nationaux, culturels et religieux », a-t-il déclaré. Il a en même temps appelé à éviter « le relativisme » qui consiste selon lui à vouloir dialoguer « sans partir de sa propre identité », « en faisant semblant d’en avoir une autre ».

Plus tôt, François avait reçu un accueil fervent de plus de 250 000 personnes sur le grand boulevard et sur la place Mère Teresa où il avait célébré la messe sous une pluie légère. Plus de 10 000 personnes étaient venues de la région, dont quelque 3 000 du Kosovo voisin. Dans sa jeep découverte, le long du boulevard orné de photos de martyrs chrétiens du communisme, il s’était arrêté plusieurs fois pour serrer des mains et prendre des enfants dans ses bras.

Les mesures de sécurité avaient été rehaussées par crainte d’hypothétiques menaces que ferait courir au pape la mouvance jihadiste en Europe, avec notamment 2 500 policiers et des tireurs d’élite sur les immeubles. Tous les participants à la messe ont été fouillés. Mais le Vatican a réaffirmé à la mi-journée qu’il n’y avait « pas de problèmes de sécurité particuliers ».
En outre, devant le président albanais Bujar Nishani, un musulman, François a fait un éloge appuyé du « climat de respect et de confiance réciproque entre catholiques, orthodoxes et musulmans » dans ce pays : « Puisse l’Albanie poursuivre sans cesse sur cette route, devenant pour de nombreux pays un modèle. »
Enfin, François a rendu hommage à une Église en plein essor après une terrible dictature marxiste.
La porte a longtemps été « bloquée par le verrou des interdictions et des prescriptions d’un système qui niait Dieu », a-t-il rappelé. « Combien de chrétiens n’ont pas plié devant les menaces, mais ont continué sans vaciller sur la route entreprise ? » a-t-il souligné, alors qu’un procès de béatification de 40 martyrs catholiques a commencé en 2002.
(Source : AFP)